Dérèglement climatique : l’humanité à l’aube de retombées cataclysmiques, alerte le Giec
Les impacts du changement climatique sont déjà dévastateurs et « le pire est à venir », détaille sur 4 000 pages un rapport des experts climat de l’ONU.
Pénurie d’eau, exode, malnutrition, extinction d’espèces… La vie sur Terre telle que nous la connaissons sera inéluctablement transformée par le dérèglement climatique quand les enfants nés en 2021 auront 30 ans, voire plus tôt, alerte un projet de rapport des experts climat de l’ONU.
Quel que soit le rythme de réduction des émissions de gaz à effet de serre, les impacts dévastateurs du réchauffement sur la nature et l’humanité qui en dépend vont s’accélérer, assure le Giec. « La vie sur Terre peut se remettre d’un changement climatique majeur en évoluant vers de nouvelles espèces et en créant de nouveaux écosystèmes », note le résumé technique de 137 pages. « L’humanité ne le peut pas ».
“Conséquences irréversibles”
Le rapport d’évaluation complet de 4 000 pages a pour vocation d’éclairer les décisions politiques. Même si ses principales conclusions ne changeront pas, il ne sera officiellement publié qu’en février 2022, après son approbation par consensus par les 195 États membres.
Parmi ses conclusions les plus importantes, figure un abaissement du seuil au-delà duquel le réchauffement peut être considéré comme acceptable. En signant l’accord de Paris en 2015, le monde s’est engagé à limiter le réchauffement à +2°C par rapport à l’ère pré-industrielle, si possible +1,5°C. Désormais, le Giec estime que dépasser +1,5°C pourrait déjà entraîner « progressivement, des conséquences graves, pendant des siècles, et parfois irréversibles ».
Et selon l’Organisation météorologique mondiale, la probabilité que ce seuil de +1,5°C sur une année soit dépassé dès 2025 est déjà de 40 %. « Le pire est à venir, avec des implications sur la vie de nos enfants et nos petits-enfants bien plus que sur la nôtre », martèle le Giec.
Trop tard pour certains animaux
Le climat a déjà changé. Alors que la hausse des températures moyennes depuis le milieu du XIXe siècle atteint 1,1°C, les effets sont déjà graves et seront de plus en plus violents, même si les émissions de CO2 sont freinées.
Pour certains animaux et variétés de plantes, il est peut-être même déjà trop tard : « Même à +1,5°C, les conditions de vie vont changer au-delà de la capacité de certains organismes à s’adapter », souligne le rapport, citant les récifs coralliens dont un demi-milliard de personnes dépendent. Parmi les espèces en sursis figurent les animaux de l’Arctique, territoire qui se réchauffe trois fois plus vite que la moyenne.
Agriculture, élevage, pêche, aquaculture…. «Dans tous les systèmes de production alimentaire, les pertes soudaines s’accroissent », observe aussi le rapport, pointant les aléas climatiques comme « principal moteur ». Or l’humanité n’est à ce stade pas armée pour faire face à la dégradation certaine de la situation.
Famine, canicule extrême
Même en limitant la hausse à 2°C, jusqu’à 80 millions de personnes supplémentaires auront faim d’ici à 2050 et 130 millions pourraient tomber dans la pauvreté extrême d’ici dix ans.
En 2050, des centaines de millions d’habitants de villes côtières seront menacés par des vagues-submersion plus fréquentes, provoquées par hausse du niveau de la mer. À +1,5°C, dans les villes, 350 millions d’habitants supplémentaires seront exposés aux pénuries d’eau. Et avec ce demi-degré supplémentaire, 420 millions de personnes de plus seront menacées par des canicules extrêmes. Le texte souligne d’autre part le danger des effets en cascade. Certaines régions et presque toutes les zones côtières pourraient être frappées par des catastrophes météo simultanées, voire plus : canicule, sécheresse, cyclone, incendies, inondation, maladies transportées par les moustiques…
Prendre des mesures fortes
Sans oublier les incertitudes autour des « points de bascule », éléments clés dont la modification substantielle pourrait entraîner le système climatique vers un changement violent et irrémédiable. Au-delà de +2°C, la fonte des calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique de l’Ouest pourraient par exemple entraîner un point de non-retour, selon de récents travaux. C’est pour cela que « chaque fraction d’un degré compte », insiste le Giec.
En dépit de ses conclusions alarmantes, le rapport offre ainsi une note d’espoir. L’humanité peut encore orienter sa destinée vers un avenir meilleur en prenant aujourd’hui des mesures fortes pour freiner l’emballement de la deuxième moitié du siècle. « Nous devons redéfinir notre mode de vie et de consommation », plaide le rapport.