Records de chaleur alarmants en Sibérie et au Canada
Aux États-Unis, en Sibérie, dans le Caucase… Un peu partout dans l’hémisphère Nord, des records de chaleur tombent. Les climatologues redoutent des réactions en chaîne, comme la libération de davantage de gaz à effet de serre avec le dégel des sols arctiques.
Alors que le sud-ouest des États-Unis commence à peine à respirer, le Service américain météorologique a publié, jeudi 24 juin, un bulletin alarmant pour le nord-ouest : une vague de chaleur déjà qualifiée d’"historique" va s’installer pour quelques jours, avec des températures supérieures à 40 °C à Seattle et à Portland.
Environnement Canada a lancé la même alerte, en Colombie-Britannique, avec 43 °C attendus à Vancouver. Tous les services de santé sont mobilisés dans cette région réputée pour ses conditions météo tempérées, voire bretonnes, où peu de logements sont équipés de climatiseurs.
Sommes-nous à "l’aube de retombées climatiques cataclysmiques" dont parlera le prochain rapport du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) et dont de larges extraits ont fuité mercredi via l’AFP ? (Agence France Presse) "Il ne fait aucun doute, pour le climatologue Michael Wehner, du laboratoire national Lawrence-Berkeley en Californie, que ces vagues de chaleur interviennent sous l’influence du réchauffement climatique. Et celui-ci résulte de la combustion d’énergies fossiles engendrée par l’activité humaine."
Selon lui, aux États-Unis, les canicules sont déjà plus chaudes d’un degré. "Si l’on ne fait rien d’ici à 2080, elles le seront de trois degrés. La vallée centrale agricole californienne connaîtra les mêmes températures que la Vallée de la mort, en été. On ne pourra plus y cultiver la terre". Pour l’instant, elle produit un quart de la nourriture des États-Unis.
Le climatologue redoute aussi une augmentation exponentielle des feux, excités par "une végétation extrêmement sèche". Le service américain des incendies surveille cinquante foyers en cours ; c’est beaucoup pour un mois de juin. En Californie, mais pas seulement. Au Colorado, ils prennent désormais dans les forêts subalpines des Rocheuses, pourtant plus humides, selon une étude validée par le chercheur Michael E.Mann, grand vulgarisateur des sciences climatiques. Le "Muddy Slide Fire" fait rage près de Denver. Déjà 2 000 ha brûlés.
Ces feux sont surveillés par les scientifiques qui travaillent sur les "points de bascule" : un phénomène climatique abrupt en entraîne un autre. Ainsi à l’autre bout du globe, la Sibérie inquiète avec ses 47,7 °C enregistrés, lundi, en Yakoutie. Les canicules, qui se répètent aussi au-delà du Cercle polaire arctique ces dernières années, provoquent des incendies incontrôlables dans ces immenses territoires. Ceux de 2020 avaient rejeté environ 59 mégatonnes de CO2 dans l’atmosphère, soit les émissions annuelles du Portugal. Ce qui aggrave une concentration de CO2 déjà saturée.
Les températures élevées contribuent aussi au dégel du pergélisol, ces terres habituellement gelées du grand nord, ce qui libère le carbone (CO2 et méthane) accumulé depuis des milliers d’années. En 2019, l’Administration américaine des océans et de l’atmosphère (Noaa) estimait que le dégel du pergélisol arctique "pourrait libérer dans l’atmosphère de 300 à 600 millions de tonnes de carbone net par an".
"Ces observations montrent que le dérèglement climatique n’est pas uniquement le problème de nos petits-enfants", insiste le chercheur Michael Wehner. "Nous sommes déjà en plein dedans."