Le ministère espagnol de l'Environnement a donné jeudi son feu vert au projet de prospections pétrolières au large des îles Canaries présenté par le groupe Repsol, provoquant la colère des autorités locales et des écologistes qui dénoncent un "acte injustifiable".
"Le ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation et de l'Environnement a émis la Déclaration sur l'impact environnemental (DIA) favorable" à un projet de prospection au large des Canaries, présenté par un consortium international menée par le géant pétrolier espagnol, a indiqué ce ministère dans un communiqué.
Ces prospections auront lieu à "une distance d'environ 60 kilomètres de la côte des Canaries et consisteront à prélever des échantillons de roche ou de fluides pour détecter la possible existence d'hydrocarbures dans la zone", ajoute le ministère.
Il affirme avoir inclus dans cette décision "des mesures de correction pour s'assurer" que les zones protégées ou proposées pour bénéficier de ce label ne sont pas affectées.
"Le processus d'évaluation s'est basé sur de rigoureuses connaissances scientifiques afin de garantir la protection maximale de l'environnement", affirme le ministère.
"La décision favorable démontre que l'activité que nous proposons est compatible avec le respect de l'environnement", a déclaré à l'AFP un porte-parole de Repsol.
Unis, les grands groupes écologistes opérant en Espagne ont immédiatement réagi, dans un communiqué dénonçant une "absurdité sans précédent".
"Il s'agit d'un acte injustifiable, qui pose un grave risque aussi bien à l'environnement qu'à la principale activité économique des îles", le tourisme, écrivent les organisations Greenpeace, WWF, Amigos de la Tierra, Ecologistas en Accion, SEO/Birdlife et WWF dans le communiqué.
"Les explorations sismiques ont un fort impact sur la faune marine protégée (cétacées, tortues) et sur les ressources pour la pêche. Mais elles ouvrent aussi la porte à de graves risques de marées noires liées aux forages pétroliers en grande profondeur, comme l'ont déjà démontré de tragiques et catastrophiques incidents comme ceux du Golfe du Mexique ou de la plateforme Deep Water Horizon", poursuivent-elles.
"Il est choquant qu'une décision aussi impopulaire soit prise juste maintenant, une fois passées les élections au Parlement européen" de dimanche, ajoute le communiqué.
Un argument repris par le président de l'une des îles des Canaries, Fuerteventura, qui a réagi très durement jeudi à l'annonce du feu vert donné par le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy. La tête de liste de son parti aux européennes, Miguel Angel Arias Cañete, était ministre de l'Agriculture jusqu'à il y a un mois.
"Ils le font après les élections européennes. Ils le font comme les grands dictateurs, dans le dos de tout le monde", a-t-il déclaré à la radio publique.
Le ministère souligne au contraire la "transparence maximale" de sa décision.
"Si le promoteur voulait à l'avenir développer cette activité, il devra présenter un nouveau projet qui sera soumis à une nouvelle procédure d'évaluation environnementale également ouverte à une participation publique", précise-t-il dans le communiqué.
L'exploration et la production d'hydrocarbures en Espagne pourrait créer 260.000 emplois en vingt ans et représenter 4% du PIB, selon une étude du cabinet Deloitte publiée en mars.
Mais pour les écologistes, le pays fait déjà face à "un risque continu de pollution" alors qu'une dizaine d'installations pétrolières opèrent le long de ses côtes. Andalousie (sud), région de Valence (est), Catalogne (nord-est), Asturies et Pays Basque (nord-ouest): toutes les régions côtières font l'objet de permis d'exploration pétrolière.
Autre destination très touristique, les îles Baléares aussi sont concernées par un projet d'exploration, du groupe écossais Cairn Energy, qui pourrait se concrétiser dans les prochains mois, si le ministère de l'Environnement donne son feu vert.