Contre l'avis de la ministre de l'Ecologie, la justice vole au secours d'une espèce d'oiseau menacée
Une victoire pour la Nature! Une douche froide pour les chasseurs et un camouflet pour une ministre de l'environnement qui ne mérite pas son titre.
Début août, la ministre de l'Ecologie a pris un arrêté autorisant la chasse de 6000 courlis cendrés, une espèce d'oiseau menacée. Face à l'ire des défenseurs des animaux, le Conseil d'Etat, saisi par la Ligue de protection des oiseaux, a ordonné la suspension de ce texte polémique.
Le Conseil d'Etat a ordonné la suspension immédiate d'un récent arrêté ministériel autorisant la chasse au courlis cendré, une espèce menacée, a annoncé mardi la haute juridiction administrative, saisie par la Ligue de protection des oiseaux (LPO).
"La suspension de l'exécution de cet arrêté doit être ordonnée en tant qu'il fixe à un nombre supérieur à zéro le total de prélèvements autorisés de courlis cendrés pour l'ensemble du territoire métropolitain", indique l'ordonnance du Conseil d'Etat rendue lundi.
Autorisation de chasser 6000 courlis cendrés
La chasse à ce petit échassier était ouverte depuis le 3 août sur le domaine public maritime des départements de la façade maritime de l'Atlantique, de la Manche et de la mer du Nord, selon l'arrêté de la ministre de la Transition écologique Elisabeth Borne, daté du 31 juillet 2019. Il prévoyait que le courlis cendré pourrait être chassé à partir du 15 septembre sur le reste du territoire.
L'arrêté autorisait la chasse de 6000 courlis cendrés pour cette saison alors que l'oiseau est inscrit sur la liste rouge des espèces menacées de l'UICN. C'est "une douche froide pour les chasseurs", a réagi la Fédération nationale des chasseurs (FNC) dans un communiqué.
"Encore une fois, l'Europe et le Conseil d'Etat ne voient pas plus loin que le bout de leur nez, ne parlant que de la chasse comme variable d'ajustement", déplorent les chasseurs.
La FNC demande désormais "la suspension immédiate des négociations autour de la gestion adaptative tant que des bases saines n'auront pas été trouvées".
"Quota zéro"
L'an dernier, le gouvernement, accusé notamment par le ministre démissionnaire Nicolas Hulot de favoriser le lobby des chasseurs, a présenté une réforme de la chasse divisant le prix du permis national par deux et mettant en place la "gestion adaptative", pour remplacer la liste figée d'espèces chassables.
"Quota zéro pour la chasse au courlis!", s'est félicitée la LPO après l'annonce de la décision en urgence du Conseil d'Etat. "La stratégie gouvernementale d'utiliser le principe de 'gestion adaptative' dans le but de laisser perdurer la chasse d'espèces sauvages vulnérables est à nouveau mise en échec", a ajouté l'association dans un communiqué.
En début d'année, le Conseil d'Etat avait déjà ordonné la suspension immédiate d'un arrêté autorisant la prolongation de la chasse aux oies sauvages en février. La LPO, qui avait saisi en urgence le Conseil d'Etat sur le courlis cendré et l'a saisi également au fond, s'alarme aussi du sort de la tourterelle des bois.
Protéger les autres espèces menacées
"Nous attendons maintenant avec inquiétude et détermination" la décision de la ministre Elisabeth Borne sur cette espèce, souligne Allain Bougrain Dubourg, président de la LPO. "Inquiétude car il y a fort à craindre qu'elle autorisera à nouveau la chasse d'une espèce en très mauvais état de conservation; détermination car toutes ces décisions incompréhensibles nourrissent la plainte de la LPO au niveau européen", a-t-il dit.
Selon la LPO, la ministre s'apprête à prendre un arrêté "pour tuer 30.000 individus alors que l'espèce est menacée d'extinction au niveau mondial". Fin juillet, après une plainte de la LPO, la Commission européenne a sommé la France et l'Espagne de renforcer la protection de la tourterelle des bois.