Ces maladies insoupçonnées causées par la pollution automobile
Résistance à l’insuline entraînant des diabètes de type 2, hypertension artérielle pouvant provoquer des maladies cardiaques ou encore asthme chronique : les méfaits de la pollution automobile sont nombreux et dramatiques.
Pour la première fois, une étude lie pollution automobile et résistance à l’insuline (qui entraîne des diabètes de type 2).
L’impact dramatique de la pollution automobile sur la santé est connu, mais une nouvelle étude pourrait bien révolutionner notre perception des dommages de cette pollution sur notre condition physique. Publiée dans le journal Diabetologia (en anglais), cette expérience montre que les enfants qui ont grandi dans des zones exposées à des hauts niveaux de pollution de l’air liée au trafic automobile sont plus résistants à l’insuline, ce qui entraîne une intolérance au glucose et est donc précurseur d’un diabète de type 2.
L’équipe allemande a collecté des échantillons de sang de 400 enfants de 10 ans, la plupart vivant à Munich, et ont analysé les émissions de pollution automobile autour de la maison où ils ont grandi (l’étude a également contrôlé le statut socio-économique, le poids à la naissance, l’Indice de Masse Corporelle et le tabagisme passif du foyer). Ce qu’ils ont trouvé est impressionnant : les résultats mettent en évidence des liens entre la proximité du lieu de résidence avec la grande route près de chez eux et le niveau de résistance à l’insuline de ces enfants. Concrètement, à chaque fois que la maison se rapproche de 500 mètres de la voie de communication très fréquentée et donc très polluée, la résistance à l’insuline augmente de 7% chez ces enfants de 10 ans.
Cette étude, comme le précise The Atlantic, est la première du genre à connecter l’exposition à long terme à la pollution automobile avec la résistance à l’insuline chez l’enfant. Reste à savoir si ces effets persistent si l’enfant déménage dans un lieu moins pollué, et surtout si ces réactions persistent jusqu’à l’âge adulte…
Ce n’est en tout cas pas le seul impact connu de la pollution automobile sur la santé. Ainsi, comme nous l’évoquions il y a quelques semaines, la pollution automobile pourrait être responsable de 14% des cas d’asthme chronique chez l’enfant. Un impact comparable à celui du tabagisme passif. C’est ce qui ressort d’une étude menée dans 10 grandes villes européennes et publiée dans la revue European Respiratory Journal.
Pour aboutir à cette conclusion, les chercheurs ont comparé l’exposition des enfants vivant à proximité d’un axe très pollué (transportant plus de 10 000 véhicules jour) à ceux vivant plus loin. Résultat : « Nous avons estimé que 33 200 cas d’asthme (soit 14% de l’ensemble des cas d’asthme observés chez ces enfants) pouvaient être attribués aux polluants automobiles (…) ce qui signifie en d’autres termes que ces cas ne se seraient pas produits si personne n’avait vécu dans ces zones », explique l’étude.
Enfin, il ne faut pas oublier que la pollution automobile n’est pas uniquement liée à ces gaz d’échappement. Elle est aussi sonore. La BBC rapporte qu’une équipe de l’université de Lund, en Angleterre, a découvert qu’une exposition journalière à un bruit moyen de 60 décibels augmente le risque d’avoir de l’hypertension artérielle de 25%. Au dessus de 64 décibels de moyenne par jour, le risque augmente de 90%. Pour rappel, l’hypertension artérielle entraîne des risques de problèmes cardiaques. Moralité, il faut vivre aussi loin que possible des grands axes routiers…
Le site Atlantico a interrogé le Dr Pierre Souvet, cardiologue et président de l’Association santé environnement France (ASEF).
Atlantico : Jugez-vous les résultats de cette analyse crédibles ? Comment les expliquer ?
Dr Pierre Souvet : A ma connaissance, c’est la première étude prospective qui a examiné la relation sur le long terme de la pollution atmosphérique liée au trafic à la résistance à l’insuline chez des enfants. Auparavant, plusieurs études chez l’homme et l’animal avaient évoqué la relation entre pollution de l’air et diabète ; probablement par l’effet de stress oxydatif que provoque les polluants sur les cellules. Il faudra poursuivre et amplifier les recherches sur ce lien qui montre une fois de plus l’étendue du problème de la pollution atmosphérique notamment parce qu’elle touche des millions de personnes.
Hormis la résistance à l’insuline, l’hypertension et l’asthme chronique, quelles autres maladies sont liées à la pollution automobile ?
Les polluants, notamment les oxydes d’azote et les particules fines qui pénètrent plus ou moins profondément dans l’organisme par l’appareil respiratoire vont avoir des effets oxydatifs, c’est-à-dire d’inflammation, sur les systèmes respiratoires (asthme, aggravation des pathologies respiratoires) et cardiovasculaires ; on s’aperçoit que les pathologies cardiovasculaires, dont les accidents vasculaires cérébraux, les coronaropathies et les infarctus du myocarde, sont augmentés. Des études ont également suggéré des effets sur le poids et la taille des bébés à naissance, ainsi que sur les capacités intellectuelles des enfants à l’âge de 5 ans exposés au trafic. Et bien sûr, les particules fines ont été classées cancérigènes.
Quelles sont les politiques mises en place pour lutter contre ce fléau ?
La pollution de l’air est responsable de 42 000 décès prématurés par an ; il me semble qu’on n’a pas pris encore la mesure de ce problème de santé publique majeur, dont le coût a été évalué entre 20 et 30 milliards d’euros par an et qui nécessite des mesures fortes, dont la fin à programmer de l’avantage fiscal du diesel (responsable d’importantes émissions de particules et d’oxyde d’azote), la valorisation des transports propres et en commun, la limitation de la circulation des véhicules en ville, la création d’ espaces verts, ne pas placer de crèches, d’écoles ou de lieux d’habitation près des grands axes routiers etc.
Que peut-on faire, à notre niveau, pour se protéger de ces dégâts ?
Les solutions doivent être majoritairement collectives, mais les effets de la pollution de l’air nous touchent individuellement. A notre niveau, nous pouvons tout de même agir, par exemple en aérant très tôt le matin ou très tard le soir, afin de ne pas faire entrer les polluants extérieurs ou en évitant au maximum la proximité des grands axes routiers, surtout lorsque vous promenez les enfants ou que vous faites du sport . En inhalant plus d’air, l’enfant ou le sportif absorbent aussi plus de polluants et en subissent donc les effets de manière plus accentuée. Dès qu’il y a des espaces où la circulation est moins intense, notamment les espaces verts, la pollution diminue ; ce sont des lieux à privilégier