Economie verte : 580.000 emplois à la clé
L'Europe doit accélérer sa transition vers une économie verte. Tel est le message de la Commission européenne (UE), dont plusieurs commissaires ont rendu public un texte en faveur de l'économie circulaire, mercredi 2 juillet, à Bruxelles. Ce « paquet », selon la terminologie bruxelloise, propose notamment aux Etats membres de l'UE de « soutenir la création d'emplois en faisant peser la fiscalité sur la pollution plutôt que sur le travail », de remédier aux déficits de compétences dans les secteurs de l'économie verte, d'anticiper les mutations sectorielles ou encore de renforcer la coopération internationale.
De nouveaux objectifs ont été aussi assignés tels que le recyclage de 70 % des déchets municipaux et de 80 % des déchets d'emballage d'ici à 2030, ainsi qu'un projet d'interdiction de mise en décharge des déchets recyclables dès 2025. Cet effort demandé aux pays européens permettrait de créer 580 000 nouveaux emplois, selon Janez Potocnik, commissaire à l'environnement.
« ACCROÎTRE LA COMPÉTITIVITÉ DE L'EUROPE »
« La transition vers une économie verte et efficace dans l'utilisation des ressources offre avant tout la possibilité d'accroître la compétitivité globale de l'Europe et de créer des emplois pérennes et de qualité », a-t-il expliqué. Un discours repris par Connie Hedegaard, la commissaire à l'action pour le climat, qui a insisté sur ces emplois qui, « loin d'être délocalisés, sollicitent les compétences locales dans des secteurs tels que l'efficacité énergétique des bâtiments, l'isolation des réseaux de distribution, le recyclage et les nouvelles technologies liées aux énergies renouvelables ».
Ce concept d'économie circulaire, ou encore écologie industrielle, est apparu dès le début des années 1970 alors qu'une petite ville danoise, Kalundborg, organisait le recyclage des déchets, et réduisait fortement, par la circulation entre entreprises, la consommation d'eau et de pétrole. Aujourd'hui, estime M. Potocnik, cette capacité à économiser les ressources en recyclant les déchets, en mutualisant les flux de matières et d'énergies, est une nécessité. « Changer pour l'économie circulaire n'est pas seulement possible, c'est bénéfique. Mais cela ne se fera pas sans définir des politiques justes », dit-il.
DEUX PLANÈTES POUR RENOUVELER LES RESSOURCES
La pénurie et le prix des matières premières et des ressources énergétiques imposent de trouver les moyens de réduire leur consommation et de les remplacer, loin du système d'économie linéaire hérité du XIXe siècle. « Nous n'avons plus le choix », martèle M. Potocnik.
Selon l'institut Global Footprint Network, qui indique la date à laquelle l'humanité a consommé les capacités annuelles de production de ressources naturelles, ce « jour du dépassement » intervient de plus en plus tôt. En 1993, les ressources naturelles produites en un an par la Terre étaient théoriquement épuisées le 21 octobre par les humains. Vingt ans plus tard, c'est le 20 août 2013. En 2050, indique Global Footprint Network, nous pourrions avoir besoin de deux planètes pour renouveler les ressources consommées annuellement.
A l'échelle européenne, la Commission promeut « l'objectif politique d'augmenter la productivité des ressources de 30 % d'ici à 2030 ». Un objectif jugé « beaucoup trop simpliste pour saisir la complexité des ressources de la production et de la consommation », par la fédération patronale européenne, Business Europe.
NOUVEAU MODÈLE À INVENTER
Les écologistes, eux, regrettent que l'économie circulaire ne soit « vue que sous l'angle des déchets ». « Dans un monde aux ressources limitées, où les prix des ressources ont augmenté de 150 % pendant la dernière décennie, et avec des taux de recyclage qui ne dépassent pas les 40 % en Europe, il est insensé que l'Union européenne et la France n'aient pas une politique plus ambitieuse de réduction de prélèvement des ressources », écrivent Les Amis de la Terre. Il est urgent, estiment les promoteurs de cette économie verte, d'organiser un nouveau modèle de production et de consommation.
L'économie circulaire promue par Ségolène Royal, la ministre de l'écologie française, devrait faire l'objet de l'une des tables rondes de la 3e conférence environnementale annoncée par le gouvernement pour la rentrée. La ministre a aussi indiqué sa volonté d'inscrire l'économie circulaire dans le cadre de la future loi sur la transition énergétique, ainsi que dans le Code de l'environnement. Mme Royal a expliqué vouloir réduire de 50 % les déchets mis en décharge et de 7 % les déchets ménagers entre 2010 et 2020.
Le Monde