Innovations technologiques et mesures de restriction se multiplient pour limiter les pollutions des transports

Publié le par Gerome

Pour faire baisser la pollution de l'air responsable de plus de 40.000 morts prématurés en France chaque année, les mesures se multiplient. Mais attention aux effets pervers...

 

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Il y aurait en Europe 350.000 décès prématurés par an dus à la pollution atmosphérique, dont 42.000 en France. Elle serait responsable d’une perte de 8,2 mois d’espérance de vie, et génèrerait un coût de 32 milliards d’euros de frais de santé par an. Une récente étude sur dix villes européennes vient de montrer que 50% de la population urbaine vit à moins de 150 mètres d’un important axe de trafic routier (10.000 véhicules ou plus par jour), et que cette proximité du trafic serait responsable de  15% à 30% des nouveaux cas d’asthme chez l’enfant.


Le sujet a été débattu lors du «carrefour mi-parcours» du Predit (Programme interministériel de recherche et d’innovation dans les transports terrestres), qui se tient à Bordeaux cette semaine. Les transports sont en effet largement responsables de cette pollution, et même si la situation s’améliore, ils émettent en Europe encore 45% des Nox, 38% du Co, 15% des PM10 et 12% des PM2,5.

Des réservoirs d’urée sur les véhicules diesel

Comment aller plus loin? Jean Delsey, conseiller scientifique à l’Iffstar (Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux), a listé un certain nombre d’innovations à venir. Ainsi «dans deux ans les véhicules diesel auront tous un réservoir d’additif à base d’urée pour faire baisser leurs émissions de No et No2, et les véhicules essence devraient tous être équipés d’injection directe.» En revanche le scientifique a indiqué qu’une expérience pour équiper rétrospectivement  1.000 bus de la RATP de filtres à particules «n’a pas bien fonctionné».


Mais attention aux effets pervers: si elle est considérée comme écologique, l’injection directe serait tout de même une source de rejet de particules fines. «Et il y a le théorique et le réel, alerte Séverine Kirchner, présidente du conseil scientifique de Primequal (Programme de recherche pour une meilleure qualité de l’air locale). Les émissions de polluants des nouveaux moteurs sont calculées dans certaines conditions, mais dans la vie de tous les jours ces émissions sont bien souvent supérieures.»


En parallèle aux évolutions technologiques les politiques publiques s’emparent aussi du sujet. Une expérimentation de Zapa (Zone d’action prioritaire pour l’air) sera menée dans huit agglomérations françaises en 2012. Il s’agira d’interdire, ou de limiter, certaines catégories de véhicules dans un périmètre. Les véhicules les plus anciens pourraient être particulièrement concernés.


«Les collectivités ont d’autres pistes que d’interdire la circulation des véhicules légers»

Le sujet divise autant la communauté scientifique que les usagers. «Nous estimons qu’il circule encore entre 6 et 8 millions de véhicules de plus de 15 ans en France, explique Jean Delsey. Si nous les interdisons que va-t-on en faire?» D’autres estiment que cette mesure serait «discriminatoire»: «on interdit les petites voitures anciennes, et on autorise les gros 4x4 tout neufs?» Mais pour Joëlle Colosio, de l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), «il est avéré que les véhicules les plus anciens sont ceux qui émettent le plus de pollution en centre-ville.»

 

Cela dit Joëlle Colosio estime que «le débat se focalise trop sur les véhicules légers. Or il y a beaucoup d’autres pistes. Les collectivités, qui seront au final les décideurs, travaillent surtout sur le fret interurbain car la livraison en centre-ville est un des gros enjeux. L’interdiction de circulation des véhicules légers en ville, c’est peut-être ce qui ne se fera pas à l’arrivée… En revanche la dimension de la zone concernée devra être relativement large, car il serait inutile de faire une expérimentation uniquement sur l’hyper-centre.»


Mais là encore attention aux conséquences. Michel André, de l’Ifsttar également, regrette qu’«un manque de cohérence entre les réglementations existantes. Une mesure de report de trafic améliore incontestablement la qualité de l’air locale, mais peut générer une hausse de la circulation à un autre endroit et n’aura donc pas d’effet au niveau global.»

 

 


Publié dans Nature

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