Le Parlement interdit les pesticides hors usage agricole à l'horizon 2020-2022
«Une nécessité» pour la santé publique et la protection de l'environnement, selon le ministre de l'Ecologie Philippe Martin...
Le Parlement a adopté définitivement ce jeudi, par vote à l'Assemblée nationale, une proposition de loi écologiste qui interdit les pesticides dans les espaces verts publics à partir de 2020 et dans les jardins particuliers à compter de 2022. Outre les écologistes, socialistes, radicaux de gauche, UDI et Front de gauche ont voté pour. Les élus UMP se sont prononcés contre ou abstenus.
Ce texte est «une nécessité» pour la santé publique et la protection de l'environnement, a estimé le ministre de l'Ecologie Philippe Martin, relevant toutefois que 90% des produits phytosanitaires étendus le sont en agriculture.
40% des communes déjà à «zéro-phyto»
Le projet de loi d'avenir agricole, voté mi-janvier en première lecture à l'Assemblée, pose quelques jalons, notamment un suivi post-mise sur le marché des pesticides.
La proposition de loi votée ce jeudi, déjà adoptée par le Sénat en novembre, interdit, elle, à partir du 1er janvier 2020, l'usage des produits phytosanitaires par l'Etat, les collectivités locales et établissements publics pour l'entretien des espaces verts, promenades, forêts.
Ce délai doit leur permettre de s'adapter à de nouvelles méthodes de travail notamment. Près de 40% des communes sont déjà à «zéro phyto», selon le groupe écologiste. Seront exemptées les voies ferrées, pistes d'aéroport et autoroutes. Les pesticides pourront toujours être utilisés en cas d'urgence sanitaire.
De l'«écolobotomie» pour un député UMP
Par ailleurs, à partir du 1er janvier 2022, pour laisser le temps aux industriels de s'adapter, la commercialisation et la détention de produits phytosanitaires à usage non professionnel seront interdites. Cette disposition vise les 45% de Français jardiniers amateurs.
La France reste le premier consommateur de pesticides en Europe, malgré le plan Ecophyto lancé en 2008 et prévoyant d'en réduire l'usage de 50% d'ici 2018. «Pourquoi légiférer à nouveau puisque le processus est en marche?», a demandé Antoine Herth (UMP), y voyant «une volonté de surenchère» des écolos «à proximité des échéances électorales».
«Ce n'est pas de l'écologie que vous faites, c'est de l'écolobotomie», a lancé son collègue Jean-Charles Taugourdeau. Rejetant le terme «pesticides», il a souligné que sémantiquement, les produits phytosanitaires «sont faits pour soigner les plantes». A une interpellation de la gauche sur d'éventuelles pressions, il a rétorqué: «il n'y a pas de lobbies, il y a 17 millions de jardins amateurs».
L'UMP a échoué à réduire la portée du texte, notamment à faire disparaître les sanctions pour les particuliers détenant ou utilisant ces produits. «S'ils ont pu donner l'illusion d'une solution miracle pour leurs utilisateurs, ces produits sont avant tout des produits chimiques actifs, ayant un impact sur le vivant végétal et animal et sur les écosystèmes», a défendu la rapporteure (EELV) de la proposition de loi et agricultrice, Brigitte Allain.
En appui, Gérard Bapt (PS), connu notamment pour son engagement contre les perturbateurs endocriniens, a mis en avant une série d'études montrant l'impact sanitaire de l'utilisation des pesticides. Dans le pays européen autorisant «le plus grand nombre de pesticides», ce texte, «bien que de portée limitée, constitue une véritable avancée», pour Jacqueline Fraysse (Front de gauche).
Plusieurs orateurs à gauche ont rappelé le «scandale» du chlordécone, pesticide employé aux Antilles entre 1973 et 1993 et interdit depuis, mais dont la présence persistante dans les sols et rivières continue à contaminer les cultures, viandes et poissons.