Les enseignes lumineuses tardent à s'éteindre en France
Opération nuit noire : samedi 13 octobre, de nombreuses municipalités françaises éteindront une partie de leur éclairage public à l'occasion de la quatrième édition du "Jour de la nuit". Cette opération vise à sensibiliser le public à la pollution lumineuse et à la protection de la biodiversité nocturne, alors que la France peine à réduire l'éclairage la nuit, notamment celui dû aux enseignes commerciales.
Il y a un an, le 26 septembre 2011, Nathalie Kosciusko-Morizet, alors ministre de l'écologie, fustigeait sur France-Inter les commerces dont les enseignes restaient allumées la nuit. Son ministère travaillait à la rédaction d'un décret sur leur extinction de 1 heure à 6 heures du matin. Les associations écologistes et les astronomes amateurs étaient ravis.
Plus d'un an après les promesses de la ministre, et trois mois après la publication de ce décret, où en est-on ? "Les choses vont dans le bon sens", selon Tom, qui coordonne le collectif d'activistes Zérowatt de Niort. Les militants de Zérowatt mènent des actions nocturnes d'extinction des enseignes. Leur prochaine opération est annoncée pour le 26 octobre. "C'est globalement positif pour Grenoble, Niort ou Poitier", assure Tom.
Selon Zérowatt, ce ne sont pas les grandes enseignes qui sont les plus réticentes, mais plutôt les petits commerçants indépendants, qui avouent souvent leur ignorance du décret.
Une mesure populaire
La mesure est populaire. A la question : "Faut-il obliger les commerces et bureaux à éteindre la nuit ?", posée sur le site participatif Newsring, 89% des 415 votants ont répondu oui. Pourtant, entre le texte publié le 1er juillet et les effets d'annonces du précédent gouvernement, selon lequel la mesure permettrait d'économiser "la consommation d'électricité annuelle de 370 000 ménages et d'éviter le rejet de 120 000 tonnes de CO2 par an", il y a un gouffre.
Finalement, la mesure ne s'applique pas aux immeubles de bureaux et ne concerne plus les vitrines des magasins mais seulement leurs enseignes lumineuses. Inévitablement, certains panneaux lumineux ont migré derrières les vitrines des magasins et restent donc allumés toute la nuit.
De plus, l'obligation d'éteindre la lumière a été circonscrite aux commerces situés dans les agglomérations de moins de 800 000 habitants, excluant la plupart des grandes villes françaises où la pollution lumineuse est importante.
Mais le principal reproche fait à la législation est l'absence de sanctions pour les contrevenants dont l'enseigne resterait allumée toute la nuit. Le problème qui se pose est celui de la difficulté pour les forces de l'ordre de faire appliquer la loi sans un arsenal répressif efficace.
En l'absence d'accord à l'amiable entre la collectivité et le commerçant, ce type d'affaire "peut aller jusqu'au contentieux et est souvent classé par des tribunaux débordés", dit Jean-Charles Valladier, le responsable de l'aménagement des espaces publics et de la publicité de Toulouse. La ville applique sa propre charte puisque l'agglomération compte plus de 800 000 habitants.
Les panneaux publicitaires en procès
Autre point faible de la loi, il n'y a pas d'obligation d'extinction pour les panneaux publicitaires. Pourtant selon Bernard Devau, le directeur de l'aménagement de l'espace public à la mairie de Montpellier, "l'image que l'on se fait d'une ville repose souvent sur ses entrées autoroutières, lesquelles sont encombrées de panneaux allumés même la nuit". Mais les recettes très importantes qu'ils apportent "les rends inattaquables".
Pourtant un consensus semble exister pour limiter le nombre de nuisance lumineuse et même George Sorel, le président de la Fédération française des association de commerçants, se déclare favorable à l'extinction nocturne des panneaux indiquant la direction d'un magasin.