Récifs de coraux : une carte mondiale pointe les plus menacés
Du nouveau pour la protection des coraux. Des chercheurs australiens ont établi une carte mondiale de la vulnérabilité des récifs. Elle permet de déceler les lieux où des mesures de conservation seront les plus utiles et semble donc un outil précieux pour les gestionnaires de ces écosystèmes fragiles.
Les récifs coralliens vont mal. Dix-neuf pour cent d’entre eux sont déjà morts, 15 % du restant va suivre dans les quinze ans à venir selon les prévisions du réseau d’observation mondial des récifs coralliens (GCRMN). La hausse de la température de l'eau liée au réchauffement global est une des causes principales de leur mauvaise santé.
Or l’écosystème basé sur les coraux est un des plus riches et productifs qui soient. Il abrite des milliers d’espèces marines, nourrit directement une centaine de millions de personnes et garantit la protection de la côte contre les assauts de la mer dans des dizaines de pays. La valeur économique des récifs est donc importante et, par surcroît, ils sont un des attraits touristiques principaux de nombreuses destinations.
Cartographier les périls est difficile car les coraux sont sensibles à des causes de stress très diverses. Une des principales causes de mort est liée aux variations excessives de la température de l’eau et en particulier son réchauffement. Il entraîne l’expulsion des microalgues en symbiose avec le polype ce qui fait blanchir le corail et finit par le tuer.
De nombreux paramètres pour une note globale
Le travail des biologistes de la Macquarie University de Sydney a donc pris en compte les caractéristiques des variations passées et prévues de la température de l’eau ainsi que bien d’autres facteurs. Parmi lesquels : la prolifération d’algues, l’exposition au soleil et aux ultraviolets, la quantité de sédiments et de polluants pouvant être apportés de la terre par les eaux de ruissellement ou encore l’effet des marées… Ils en ont formé trois catégories : les variables liées au soleil (température, UV), les paramètres augmentant le stress (eutrophisation, apport de sédiments) et ceux diminuant ce stress (le vent, les marées), qu’ils ont pu intégrer sous forme mathématique dans un modèle, d’où est issue la carte.
La carte synthétisant le travail de l'équipe de Joseph Maina localise les principaux récifs mondiaux par des points colorés correspondant à une note entre 0 et 1. Du vert pour un récif en pleine forme (valeur 0), le dégradé va jusqu'au rouge, (valeur 1), symbole d'un fort risque de disparition. La Réunion, avec un score de 0,13, est selon l'étude le meilleur élève. © Joseph Maina
Sur ce planisphère, chaque récif de corail se voit attribuer une note, une valeur entre 0 et 1 correspondant à l’importance du stress qu’il subit et donc à son risque de disparition. Les données brutes sont disponibles sur le site du journal Plos One. La principale source de stress est l'augmentation de température de l'eau à cause du réchauffement climatique, renforcé ou réduit par d'autres facteurs également pris en compte. Une valeur basse correspond à des zones en bonne santé et faiblement menacées ; en se rapprochant de 1, les perturbations augmentent et l’avenir s’assombrit.
Malheur aux vaincus
Pour l’organisation des efforts de protection, la carte est un outil précieux car elle est censée permettre de mieux diriger les investissements. Mais elle fait émerger une idée assez nouvelle : pour certains biologistes, dont le co-auteur de l’étude Tim McClanahan, de la Wildlife Conservation Society de Mombasa au Kenya, il faudrait « se concentrer sur les [récifs] gagnants, pas sur les perdants ». Un point de vue très pragmatique…
Des critiques quant à la valeur des diagnostics s’élèvent également car la réponse des récifs à une même agression peut être fort différente. Mais Joseph Maina, responsable de l’étude, précise bien que leur travail compile de manière lisible et efficace les agressions subies par le corail pour en tirer une valeur globale de stress. Il s'agit d'une somme de paramètres extérieurs, et l’avenir du récif dépend bien sûr fortement de l’adaptabilité et de la résilience des coraux face à ces menaces. Le séquençage du génome d'un corail, effectué récemment, apporte des précisions sur ces points.
Les informations apportées par ce travail dressent en tout cas un état des lieux précis de la vulnérabilité du corail face au réchauffement climatique. Utilisées en connaissant leurs limites, elles rendront tout de même la vie plus facile à ceux qui, dans le monde, tentent de sauver les récifs.