« Ce qui se passe ici n’est pas normal » : le changement climatique crée des forêts fantômes

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En raison de phénomènes causés par le changement climatique, certaines forêts n'ont pas le temps de s'adapter. Les arbres meurent et de nouveaux arbres n'arrivent plus à pousser. Cela génère des forêts fantômes.

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À gauche de la route, des forêts fantômes, à droite, des forêts encore saines. C’est le résultat de l’ouragan Irène, en 2011, qui avait propulsé un mur d’eau salée jusqu’à cette route.

« Sur toute la côte de la Caroline du Nord, les preuves de la disparition des forêts sont partout. Presque tous les fossés en bordure de route que je croise en conduisant dans la région sont bordés d’arbres morts ou mourants », écrit Emily Ury. Avec trois autres biologistes, cette écologue est à l’origine d’une étude acceptée dans la revue Ecological Applications, fin mars 2021, et dédiée à la déforestation rapide observée sur la côte Atlantique des États-Unis.

« Comme tous les organismes vivants, les arbres meurent. Mais ce qui se passe ici n’est pas normal. » Dans cette région des États-Unis, la déforestation est visible ne serait-ce qu’à l’œil nu d’après les biologistes à l’origine de cette étude. Dans la zone concernée, qui comprend pourtant le grand refuge côtier de Caroline du Nord, un lieu protégé et donc dénué d’activités humaines, des parcelles entières d’arbres meurent et les jeunes arbres ne poussent pas pour les remplacer.

Comme l’expliquent les auteurs, la principale origine du phénomène est à trouver dans la montée des eaux. Celle-ci provient du changement climatique et s’amplifie. Elle provoque une humidification accrue des zones humides, mais les rend également plus salées — l’eau de mer est 400 fois plus salée que l’eau douce. C’est là que se pose un problème pour les arbres initialement installés dans un écosystème d’eau douce. « L’élévation rapide du niveau de la mer semble dépasser la capacité de ces forêts à s’adapter à des conditions plus humides et plus salées », explique Emily Ury. D’autant plus que, dans cette région, l’élévation est très rapide : 30 centimètres en un siècle (et elle pourrait atteindre 1 mètre ou plus d’ici la fin du XXIe siècle).

Une grande partie des forêts fantômes de la Caroline du Nord sont toutefois observées à plus d’un kilomètre des côtes. Car avant même que la montée des eaux ne soit visible, l’eau de mer infiltre ces régions jusqu’à atteindre les forêts côtières. Une infiltration aidée dans cette région par les centaines de kilomètres de fossés et de canaux construits au milieu des années 1900 comme conduits d’évacuation.

En pénétrant les terres de ces forêts, le sel « aspire » l’eau contenue dans les cellules végétales et assèche les semences en privant les graines de leur propre humidité. Pour les arbres sensibles à ce phénomène, la germination de nouvelles pousses ne fonctionne plus, et c’est une réaction en chaîne : les arbres existants meurent sans être remplacés par d’autres arbres, sauf par des herbes et des petits arbustes tolérants au sel. «  Les arbres morts aux troncs pâles, dépourvus de feuilles et de branches, sont un signe révélateur des niveaux élevés de sel dans le sol », déplore Emily Ury.
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Emily Ury et ses collègues ont étudié les forêts fantômes depuis l’espace, à l’aide d’images satellites de 1985 à 2019, pour mieux identifier les causes, l’état actuel et l’évolution du phénomène. «  Les résultats ont été choquants », écrit Emily Ury. En 35 ans, 11 % de la surface forestière du refuge côtier de la Caroline du Nord s’est transformé en forêts fantômes, soit 21 000 acres (plus de 8 000 hectares).
En plus de l’élévation du niveau de la mer, «  les phénomènes météorologiques extrêmes, alimentés par le changement climatique, causent des dommages supplémentaires dus aux fortes tempêtes, aux ouragans plus fréquents et à la sécheresse ». Les tempêtes et les ouragans projettent de l’eau salée sur les forêts ; et la sécheresse, période durant laquelle l’eau douce est absente, facilite la pénétration et les effets de l’eau salée dans les sols forestiers.

C’est ainsi qu’Emily Ury et ses coauteurs identifient un point de bascule en 2011-2012, une période intense de sécheresse, à laquelle se sont ajoutés l’ouragan Irène et des feux de forêt. Cela a provoqué des « dépérissements massifs d’arbres dans toute la région ».

Des conséquences sur la biodiversité et le climat

Les forêts fantômes permettent de constater les conséquences du changement climatique à l’échelle globale, même là où l’être humain n’agit plus directement (dans cette région, plus de la moitié des forêts fantômes sont observées dans une zone « protégée »). La perte rapide des forêts sur la côte de la Caroline du Nord vient avec des « répercussions en cascade sur la faune et la flore », par exemple sur le loup roux et le pic à tête rouge, qui sont devenues des espèces menacées ces dernières années. Par ailleurs, les forêts humides constituent des stocks de carbone, et leur disparition retire peu à peu un « tampon » face au réchauffement.

La Caroline du Nord n’est qu’un aperçu plus visible d’un phénomène ayant lieu dans d’autres localités. De nombreuses régions côtières, dans le monde, sont concernées par la montée des eaux ne serait-ce qu’en étant atteintes par l’eau salée, alors que ce n’était pas le cas avant dans ces écosystèmes. Cela menace alors la biodiversité, certes, mais aussi les cultures locales, ou même les aquifères d’eau douce dont des populations dépendent pour obtenir de l’eau potable.

Les solutions ne sont toutefois pas inexistantes. Elles consistent notamment en de nouvelles approches de gestion des terres, avec des stratégies adaptatives, comme faciliter la transition des forêts vers les marais salés en introduisant par exemple, dans les zones menacées, des plantes adaptées aux eaux salées. Bien que cette idée soit controversée, « car elle va à l’encontre de la volonté de préserver les écosystèmes tels qu’ils sont », Emily Ury estime que cela pourrait être mieux que de laisser ces forêts mourir. «  Une gestion proactive peut prolonger la durée de vie des zones humides côtières, leur permettant de continuer à stocker du carbone, à fournir un habitat [à la biodiversité], à améliorer la qualité de l’eau et à protéger les terres agricoles et forestières productives des régions côtières. »

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Climat : la moitié des poissons de haute mer a fui les eaux équatoriales

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En quarante ans, de nombreuses espèces se sont s’éloignées de la zone équatoriale, devenue invivable. C’est ce que conclut une nouvelle étude publiée dans la revue «Pnas».

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Dans les océans, l’exil climatique est bien en marche. Selon une étude inédite publiée dans la revue Pnas, les eaux équatoriales sont les plus touchées par la perte de richesse en espèces. La moitié des poissons de haute mer qui y nageaient ont déserté en quarante ans. Et ce, «en réponse directe au changement climatique», parce que leur milieu de vie est devenu trop chaud.

Cela «montre que la biodiversité équatoriale est menacée par le changement climatique et qu’elle y réagit actuellement», commente l’étude. Ce qui pourrait avoir des répercussions tant pour les écosystèmes que pour les activités qui en dépendent : la pêche et le tourisme.

L’étude a réuni des chercheurs de prestigieuses universités en Australie, Nouvelle-Zélande, à Hongkong et en Afrique du Sud. Comme attendu, ils constatent que «le nombre d’espèces a diminué à l’équateur» et a augmenté dans les zones subtropicales depuis les années 50. Les zones riches en espèces se sont donc déplacées et remontent vers les pôles.
Trop chaud sous les tropiques

Les travaux, pilotés par Chhaya Chaudhary, ont été menés pour la première fois à l’échelle mondiale et pour tous les types d’espèce. L’objectif était d’évaluer s’il y avait bien une baisse constante de la richesse des espèces à l’équateur sur tout le globe. Les chercheurs ont donc examiné la répartition de 48 661 espèces d’animaux marins depuis 1955. Et ce grâce au Système d’information sur la biodiversité océanique (Obis), une base de données mondiale accessible en ligne, dont la création a été dirigée par le professeur de l’Université d’Auckland Mark Costello, co-auteur de l’étude.

Plus les eaux se réchauffent autour de l’équateur, plus les espèces se raréfient, observent les chercheurs. La majorité des espèces stagne ou fuit lorsque la température moyenne annuelle de la mer est supérieure à 20°C. Dans l’hémisphère nord, les poissons de haute mer (sardines, anchois, maquereaux, éperlans, harengs, bonites, thons, espadons, requins…) ont davantage déménagé vers les pôles que les espèces des fonds marins (coraux, huîtres, algues…).

Ce changement est observé dans une moindre mesure pour l’hémisphère sud, où le réchauffement océanique est moins marqué.
«Nous réalisons que les tropiques ne sont pas si stables et sont trop chauds pour de nombreuses espèces», explique dans un communiqué l’Université d’Auckland. «Nos travaux montrent que les changements climatiques causés par l’homme ont déjà affecté la biodiversité marine à l’échelle mondiale pour toutes sortes d’espèces. Le changement climatique est avec nous maintenant, et son rythme s’accélère», avertit le biologiste Mark Costello. Ce qui n’augure rien de bon pour la suite.

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Masques et gants : les animaux victimes d'une nouvelle pollution liée au Covid-19

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Des chercheurs ont établi une liste non-exhaustive des animaux ayant été victimes de l'utilisation de gants et de masques jetables par les humains.

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Un singe mange un masque anti-Covid en Malaisie. (Photo : Mohd RASFAN / AFP)

Depuis plus d'un an, le monde a adopté de nouvelles habitudes. Chacun sort avec un masque ou des gants en latex afin de se prémunir de la pandémie de Covid-19. Au-delà de la crise sanitaire, ces objets abandonnés après utilisation représentent une nouvelle forme de pollution particulièrement nuisible pour la faune sauvage. Face à ce phénomène, qui touche tous les continents, les scientifiques tirent la sonnette d'alarme et appellent le public à mieux gérer ces déchets. Dans une étude publiée le 22 mars dans la revue Animal Biology, des chercheurs néerlandais ont dressé une liste non-exhaustive des animaux victimes collatérales de la pandémie de SARS-CoV-2.  

Un petit retour en arrière s'impose. En 2019, les autorités chinoises détectent un nouveau coronavirus responsable de la mort de plusieurs dizaines de personnes. Dès mars 2020, l'OMS déclare que le monde est confronté à une pandémie. Rapidement, le port du masque, de gants ou de blouses devient nécessaire, voire obligatoire, dans l'espace public de nombreux pays. "On estime que nous utilisons chaque mois 129 milliards de masques et 65 milliards de gants dans le monde", remarquent les biologistes Auke-Florian Hiemstra du Naturalis Biodiversity Center et Liselotte Rambonnet de l'université de Leiden, à l'origine de cette étude. Conséquence : la pollution par ces protections à usage unique a bondi en un an, même dans les régions inhabitées comme par exemple les îles Soko, à Hong Kong. Au point de menacer l'existence de nombreux animaux qui ingèrent ces déchets ou, piégés par ces derniers, finissent par mourir d'épuisement.  

Auke-Florian Hiemstra et Liselotte Rambonnet révèlent ainsi que des singes ont été observés en train de mâcher des masques faciaux, que des oiseaux et des poissons se sont retrouvés piégés dans des gants en latex aux Pays-Bas, ou encore qu'un masque de protection a été retrouvé dans l'estomac d'un pingouin. Mais les scientifiques ont souhaité intégrer ces découvertes dans un contexte plus large. Elles ont donc épluché toutes les observations réalisées sur le sujet à travers le monde, via les médias sociaux, les journaux locaux, les sites d'informations, mais aussi via les photographes spécialisés, les ramasseurs de déchets, les ornithologues, ou les centres de sauvetage de la faune.

De nombreux exemples

L'une des premières preuves du risque que représentent les protections sanitaires pour les animaux remonte à août 2020 avec l'image d'une perche commune piégée par un gant. Seule la queue du poisson d'eau douce dépassait. Les chercheurs font également état des premières observations connues de l'utilisation de masque par différents oiseaux pour la nidification. "Ce comportement a d'abord été observé chez une foulque macroule (Fulica atra), une espèce connue pour ses nids anthropiques et nichant sur le canal Keizersgracht à Amsterdam, le 3 juin 2020", notent les scientifiques. Un autre nid de la même espèce a été repéré à Leyde. Il comprenait cette fois-ci un masque et un gant en latex.
Si cette espèce d'oiseaux utilisent à bon escient cette pollution, d'autres en pâtissent gravement. "La première victime signalée des déchets du Covid-19 dans le monde, à notre connaissance, était un merle d'Amérique (Turdus migratorius). Cet oiseau semble être mort après s'être emmêlé dans un masque facial à Chilliwack, en Colombie-Britannique, au Canada, le 10 avril 2020", indiquent les chercheuses. D'autres cas ont suivi.

Au-delà des oiseaux et des poissons, d'autres animaux souffrent de cette pollution : chauves-souris, renard roux, hérisson commun, crabes, pieuvres... Et la liste n'est pas complète. Au Brésil, un manchot de Magellan retrouvé sur une plage avait dans l'estomac un masque facial. Des macaques crabiers ont également été photographiés en train de mâchouiller des masques en Malaisie. Des chiens et des chats ont été hospitalisés après avoir ingéré des déchets médicaux liés au Covid-19. Bien entendu, les témoignages et observations ne suffisent pas à lister l'ensemble des interactions entre les animaux et la pollution sanitaire.  

Prise de conscience

Comment expliquer un tel phénomène ? "Les animaux s'affaiblissent parce qu'ils s'emmêlent ou meurent de faim à cause du plastique dans leur estomac. Les vertébrés et les invertébrés sur terre, dans l'eau douce et dans l'eau de mer s'emmêlent ou sont piégés dans les déchets du coronavirus", expliquent les deux auteurs du rapport.  

"Pour mesurer toute l'ampleur de ce problème", les auteurs de cette nouvelle étude encouragent les personnes à ajouter leurs observations d'animaux affectés par cette pollution sur le site www.covidlitter.com. Alors que la pandémie n'est pas encore derrière nous, les scientifiques jugent urgent de prendre conscience du danger que représentent cette nouvelle pollution trop souvent ignorée pour la faune sauvage.

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L'hélicoptère au lieu des remontées mécaniques : comment les riches ont skié en temps de Covid

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Fermeture des remontées mécaniques oblige, les skieurs les plus mordus et surtout les plus fortunés ont privilégié… l'héliski. Une pratique qui consiste à se faire déposer par hélicoptère au sommet d'une montagne avant de la dévaler. Pas vraiment donné à tout le monde.

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L'hélicoptère doit se poser d'une minute à l'autre. En l'attendant, Philippe, doudoune bleue pétante sur le dos et chaussures de ski aux pieds, retrace à ses compagnons casqués et en combi quelques souvenirs d'une précédente expédition d'héliski, au Kamchatka. « Là-bas, c'était vraiment l'aventure. On volait dans de vieux hélicos de l'armée russe qui puaient le kérosène. Les pilotes étaient tous des anciens de la guerre d'Afghanistan. Et le décor… Fantastique. » Cette année, pandémie oblige, le chef d'entreprise ne peut pas s'offrir de périple à l'autre bout du globe, mais trouve son bonheur en vallée d'Aoste, en Italie.

Ce matin de mars 2021, sur l'héliport de Courmayeur, à la sortie du tunnel du Mont-Blanc, ils sont une quinzaine de skieurs à se payer le Graal, à s'envoler par petits groupes en direction des cimes enneigées, des glaciers et des vallées désertes. Déposés à 3 500 mètres d'altitude, ils auront la montagne pour eux, la plus belle des poudreuses, des descentes hors du monde et, surtout, un hélicoptère à disposition en guise de remontée mécanique. « C'est un privilège énorme, c'est un bonheur, poursuit Philippe. Mais on arrive au bout d'un cycle, je pense. On voit bien que ça pose quand même un peu problème pour la société d'aujourd'hui de prendre un hélico pour aller skier », concède-t-il, coupé par son guide qui signale l'arrivée imminente de l'appareil.

"Ils nous ont retiré les remontées, on prend l'hélico"

L’Écureuil – un hélicoptère léger, le même qui s'est posé au sommet de l'Everest en 2005 – surgit bruyamment, et se pose à quelques longueurs de bras des skieurs, genoux à terre et têtes courbées pour résister au souffle des pâles. Luca, le mécano, charge skis et bâtons dans le panier. Philippe et ses amis s'engouffrent à l'intérieur, se serrent à l'arrière. Porte fermée. Bref échange par radio, et l'hélico reprend son envol.

Huit minutes plus tard, c'est au tour de quatre copains, courtiers en assurances et fournisseurs pour des fonds d'investissement, de monter à bord. « Ils nous ont retiré les remontées, on prend l'hélico », se marre Bruno avant de vanter « le rêve de tout skieur ». Dernier groupe de la matinée : trois chirurgiens marseillais et un « futur golden-boy ». « C'est une clientèle fortunée, c'est sûr », glisse Jean-Charles, l'un des pilotes de la compagnie. « Mais c'est une clientèle respectueuse, qui aime réellement la montagne. Ce n'est pas des stars qui se paient un hélico pour faire n'importe quoi. L'héliski, c'est une pratique qui permet d'accéder très simplement à des endroits magnifiques, vierges. C'est comme le surfeur qui trouverait sa vague, sauvage, jamais surfée. Et ça, je crois que ça se défend. D'ailleurs on voit aussi des étudiants qui se saignent en quatre pour essayer. »

Une pratique plus courante dans les années 80

Pour une unique descente d'héliski, il faut compter plus de 400 euros par personne. Pour une journée complète, 1 000 euros. Une paille pour certains habitués, capables de se faire déposer en hélico-taxi depuis les pays voisins avant d'embarquer dans un appareil homologué pour la haute montagne.

Interdit en France par Valéry Giscard d’Estaing, pourtant très friand de la dépose en hélicoptère dans les sommets alpins jusqu'à se faire griller et pointer du doigt, l'héliski perdure de l'autre côté de la frontière, en Suisse et en Italie, occasionnant un drôle de jeu de saute frontière. Née au Canada au début des années 1970 - et aujourd'hui véritable industrie dans les Rocheuses où les hélicos, dans un ballet incessant, font office d’ascenseur vers les hauteurs -, la pratique n'a plus vraiment bonne presse en Europe. Si le « Far West des années 1980 », où les aéronefs pullulaient dans les stations, volaient et se posaient à peu près n'importe où, occasionnant un désordre monstre dans le massif, semble désormais complètement révolu au vu de la nouvelle législation et de l'encadrement, la pratique n'en est pas moins taxée d'anachronisme.

Une niche pour "de très bons skieurs avec des moyens"

« On paye les pots cassés d'une époque où c'était le Vietnam dans les montagnes », regrettent Jean-Charles et Marco, respectivement pilote et guide gestionnaire pour la compagnie italienne. « C'est sûr que c'est facile de taper sur l'héliski, c'est une cible symbolique. Mais je crois que c'est se tromper de combat, d'autant plus que ça reste extrêmement marginal. Mais on est dans une époque où tout est critiquable. Ok, ça fait du bruit. Mais où ça ? Dans des vallées où il n'y a personne. Si on travaillait comme des cow-boys, ça ne marcherait pas. Mais on fait les choses en bonne intelligence, il y a de la place pour tout le monde dans les Alpes. D'autant plus que les pilotes d'héliski sont les mêmes que ceux qui interviennent pour porter secours où faire vivre la montagne. »

Cet hiver, Kevin Gourgues, guide de haute montagne spécialisé dans l'héliski, habitué à s'aventurer avec des clients au Pakistan, en Alaska, en Islande ou dans l'Extrême-Orient russe, n'a pas pu emmener dans la poudreuse sa clientèle extra-européenne, refoulée aux frontières. Mais le téléphone sonne tout de même. « Beaucoup de gens qui n'ont clairement pas le niveau m'appellent juste pour prendre l'hélico car les remontées sont fermées… Eux, je ne les prends pas. L'héliski, c'est une activité de niche qui s'adresse à une clientèle particulière : de très bons skieurs avec des moyens. » « Je n'emmène pas les clients pour faire du manège mais pour qu'ils aient une expérience inoubliable », ajoute Quentin, un autre guide.

Interdit sur les pentes françaises, autorisé sur les pentes italiennes

D'autres compagnies sont moins tatillonnes, et acceptent volontiers des touristes avec un niveau de glisse médiocre, et les déposent dans des pentes plus accessibles, à condition de mettre le prix. « Il y a des gens qui sont tout à fait capables de se dire : tiens, il n'y a pas de remontée mais on pourrait prendre un hélico demain », caricature Hervé, guide basé à Courchevel, fin connaisseur des mœurs d'une clientèle aux portefeuilles bien remplis.

« Quand on est dans l'hélico, c'est beau. Et c'est chouette de se faire déposer sur sa montagne, c'est sûr », admet Vincent Neirinck, en charge du dossier « Silence » pour l'association Moutain Wilderness, très active sur le sujet de l'hélicoptère en montagne. « Mais ça ne va pas. Quelques-uns ne peuvent pas foutre en l'air le bonheur de tous les autres. La montagne, c'est un cadre exceptionnel qui implique des responsabilités » insiste-t-il, tout en reconnaissant l'utilité de l'hélicoptère en tant « qu'outil ». « Ce n'est pas pour rien que l'héliski est interdit en France. Même si la loi permet des choses absurdes selon que les pentes soient côté français ou italien… Et il n'y a pas que l'héliski ! Il y a tous les vols panoramiques et les hélicoptères qui servent de simple navette pour faire gagner du temps aux plus riches », accuse-t-il.
"Certes, ce n'est pas écolo"

Kévin Gourgues, lui, a renoncé à défendre son activité sur la place publique. « C'est un super bouc émissaire, très facile à pointer du doigt. Ce n'est pas un hasard si dans ce petit monde on en vient à se dire « pour vivre heureux, vivons cachés. » Certes, ce n'est pas écolo et on ne peut pas en faire l'apologie. Mais nous aussi on espère qu'un jour on pourra avoir des appareils plus discrets, électriques. »

En attendant, Jean-Charles se régale aux commandes de l’Écureuil. En survolant les traces matinales des skieurs qui serpentent en plein rêve au pied des Pyramides Calcaires, le Mont Blanc en arrière-plan, celui qui a piloté au service de scientifiques dans les coins les plus reculés de l'Arctique ou pour « la plus noble des missions : le secours » se dit que, tout de même, s'offrir un tel décor n'a pas de prix.
Source : Marianne.fr

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La Ville de Lyon va déclarer "l’état d’urgence climatique"

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A travers une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, la Ville de Lyon a annoncé ce mardi qu’elle allait déclarer "l’état d’urgence climatique" à l’occasion du prochain Conseil Municipal ce jeudi.

Dans cette vidéo, il est notamment dit que si rien n’est fait d’ici 7 ans, "Lyon fera face à de nombreux défis comme des canicules plus fréquentes, un climat similaire à celui d’Alger, des pluies plus rares et des risques de crises sociales". Toujours selon les services de la Ville, il faudrait "diminuer nos émissions de carbone de 40 % par rapport à 1990" à l’horizon 2030.

C'est pour atteindre cet objectif qu'un délibéré sera voté lors du Conseil Municipal ce jeudi. Il comprendra notamment un recadrage du "projet de programmation pluriannuelle des investissements (PPI)" autour des enjeux planétaires. Selon nos informations, plusieurs enveloppes budgétaires seront créées sur l'enveloppe de 1,2 milliard d'euros.
Ainsi, 40 millions d’euros iront pour l’amélioration des performances énergétiques des bâtiments municipaux. Même montant pour moderniser l’éclairage urbain et les véhicules publics. 80 millions d'euros (minimum) seront consacrés à la rénovation et à la transition écologique des bâtiments municipaux, tandis que 90 millions seront dédiés à la création de nouveaux espaces végétalisés.

Le maire de Lyon Grégory Doucet répondrait ainsi à l’appel d’Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU, qui souhaite que tous les décideurs nationaux et locaux redoublent d’efforts sur la question climatique.
Cette déclaration d’état d’urgence serait donc un mélange entre une prise de position claire et une multitude de mesures pour l’accompagner.
Quoi qu’il en soit, plusieurs élus écologistes tentent d’ores et déjà de donner de l’ampleur au #UrgenceClimatiqueLyon sur les réseaux sociaux.

 

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