Climat: les Africains piégés par les pays développés?
Les négociations de la Conférence sur le climat de Durban, en Afrique du Sud, s’achèvent le 9 décembre, avec probablement ce que beaucoup annoncent comme un accord à minima. Comme ce fut le cas à Cancun, en décembre 2010, et à Copenhague en décembre 2009.
Les 53 pays du groupe Afrique, parmi les plus vulnérables au changement climatique, ont essayé de peser dans la balance, mais ils sont eux même divisés entre eux. En particulier sur la direction que doit prendre l’agriculture africaine, dont dépendent deux-tiers des Africains.
Le quotidien sud-africain Mail & Guardian rapporte la critique d’un négociateur pour les pays de l’Afrique de l’ouest à la conférence. Il pense que le groupe qui représente l’Afrique devrait parler de la question de l’agriculture en termes d'«adaptation», alors que beaucoup ont «succombé» au concept de «mitigation» imposés par les pays développés.
En fait, la mitigation vise à atténuer l’impact négatif de l’activité agricole sur l’environnement. Cette approche est décriée par le Ghana, le Mali ou la Tanzanie mais elle est soutenue par l’Afrique du Sud et son «agriculture adaptée aux changements climatiques» (climate-smart agriculture). Selon le négociateur, la mitigation forcerait les pays africains à rentrer dans le marché international des émissions de dioxyde carbone.
Ce marché du Co2 est un dispositif international de transactions de crédits d’émission de gaz à effet de serre. Ainsi, un pays qui émet moins de Co2 que ne le prévoient les traités, peut vendre (virtuellement) la marge d’émission qui lui reste à un autre pays qui pourra ainsi dépasser la limite prescrite.
Or, «ce marché ne peut pas fonctionner en Afrique parce que la majorité des fermiers africains ont moins de deux hectares de terres, ce qui est insuffisant pour pouvoir capter une quantité non négligeable de gaz à effets de serres et la vendre», explique le président du groupe Afrique à la conférence, Tosi Mpanu-Mpanu.
Ainsi ,«une exploitation de moins de 2 hectares pourrait seulement gagner 3 dollars par an, avec le prix actuel du Co2», explique Harjeet Singh de l’ONG Action Aid International. Seule l'Afrique du Sud avec ses grandes exploitations agricoles pourrait y gagner.
Selon Teresa Anderson, de la Fondation Gaïa, ce sont les pays développés qui veulent imposer des mesures qui les arrangent:
«Il s’agit d’un exemple type du monde développé qui essaie d’utiliser son influence dans la région pour fabriquer un concensus sur une stratégie qui leur convient, mais qui n’est pas dans le meilleur intérêt des petits exploitants africains.»
Pour le négociateur, «le temps est venu pour les nations africaines de dire simplement ‘ça suffit, on se fait avoir’».