Macron s'apprête à déforester la Guyane pour chercher de l'or.... sans doute pour se faire sa couronne

Publié le par Notre Terre

Le gouvernement s'apprête à autoriser la destruction et la pollution d'une région qui accueille à elle-seule 50 % de la biodiversité française.
La récente visite d'Emmanuel Macron en Guyane a malheureusement confirmé les rares ambitions qu'il avait pour cette région française négligée par l'État depuis tant d'années: l'exploitation aurifère de la Montagne d'Or est sa priorité. Se servant d'un contexte économique et social défavorable, et sous couvert d'un pseudo-débat public - qui n'est pas amené à revoir l'utilité d'un tel projet minier - le gouvernement s'apprête à autoriser la destruction et la pollution d'une région qui accueille à elle-seule 50 % de la biodiversité française. Pourtant, des solutions existent pour stopper la course à l'extractivisme et développer une économie respectueuse de l'environnement comme des droits des peuples autochtones, totalement abandonnés de la République.

S'il tient ses promesses, le gisement de la Montagne d'or mènera à l'extraction de 85 tonnes d'or sur 13 ans. À terme et au cours actuel du métal jaune, plus de 3 milliards de dollars pourraient sortir de la forêt amazonienne française... un véritable puits de carbone que notre pays devrait logiquement préserver, si tant est que "Make Our Planet Great Again" n'est pas un simple slogan marketing.

Selon l'opérateur, pour extraire l'or, 78000 tonnes minimum d'explosifs, 46.500 tonnes de cyanure et 142 millions de litres de fuel seront nécessaires pour les 13 ans de durée de vie du projet. Selon les plans de construction, la fosse mesurera 2,5 km de long, 500 m de large et 400 m de profondeur au point le plus bas. Il faudra pour le mener à bien défricher l'équivalent de 32 Stades de France, produire une montagne de déchets miniers haute comme cinq dunes du Pilat, refaire la piste d'accès qui s'enfonce dans la forêt amazonienne sur plus de 120 kilomètres et la doubler d'une ligne à haute tension pour alimenter un chantier qui utilisera l'équivalent de 100% de la consommation de la ville de Cayenne.

Ainsi 450 millions de tonnes de roches seraient extraites puis broyées à la Montagne d'or (à raison de moins de deux grammes d'or par tonne extraite). Après récupération de l'or, les boues contenant les déchets miniers seront ensuite stockées dans des barrages. Le déblai entraînerait la création artificielle et permanente de deux dômes de roches de 100 mètres de haut voire plus, ainsi que d'un mont endigué de 70 m de haut renfermant, selon les industriels, 54 millions de tonnes de boues issues du processus de traitement de la roche avec le cyanure.

Le risque et les conséquences du drainage minier acide qui en résulterait pousse - à juste titre - les associations à craindre que se produise une catastrophe similaire à celle qu'a connue le Brésil en 2015 où des millions de tonnes de boues cyanurées s'étaient déversées sur des habitations à la suite de la rupture d'une digue. Au moins 25 ruptures de digues minières ont eu lieu dans le monde depuis le début de ce siècle. En janvier 2000, plus de 100 000 mètres cubes d'eau polluée au cyanure s'étaient échappés d'une mine d'or en Roumanie, et polluaient les rivières et fleuves environnants. L'eau potable a été durablement empoisonnée en Roumanie, Hongrie, Serbie et Bulgarie.

Alors que le projet serait prétendument rentable, le gouvernement s'apprête à le subventionner. Selon les calculs du WWF, l'opération absorberait sur treize ans – la durée d'exploitation envisagée – 420 millions d'euros d'argent public, sous forme de défiscalisation et de subventions. C'est-à-dire que chacun des 750 emplois directs annoncés reviendrait à un coût de 560.000€ pour la durée du projet, une grave gabegie d'argent public, qui pourrait à la place permettre de financer 750 emplois aidés...pendant 42 ans.

Nous en profitons au passage pour rappeler à Emmanuel Macron que lors de la négociation du plan d'urgence pour la Guyane, l'État s'était engagé à attribuer 400.000 hectares aux peuples autochtones au travers de l'établissement public placé auprès du Grand Conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinengué. Le 27 octobre, vous reveniez sur les engagements pris par votre prédécesseur, et proposiez à la place de mettre en place un plan établi avec les collectivités sous forme d'appels à candidatures. Nous sommes solidaires des peuples premiers, et vous appelons à respecter les engagements de la France.

Monsieur le Président, un tel projet n'est vraiment pas disruptif quand on sait que la véritable montagne d'or se trouve dans les mégatonnes de déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE) - si peu recyclés dans notre pays - et encore moins quand on considère que la cyanuration est un processus chimique développé en 1887. Selon les entreprises spécialisées du secteur du recyclage des DEEE, nous pouvons "simplement" démonter cinq ordinateurs usagés et recycler leurs circuits imprimés et leurs connecteurs, pour obtenir un gramme d'or. Mieux, une tonne de téléphones recyclés permettrait d'obtenir 200 grammes d'or et d'autres métaux précieux (l'argent, le palladium, le cuivre ou l'étain) aussi sujets à convoitise en France métropolitaine.

Le vieux monde de l'industrie minière ne mérite pas tant d'attention, c'est pourquoi nous proposons à la place un ensemble de solutions innovantes qui bénéficie vraiment à la société guyanaise, pour un développement alternatif, local, durable, respectueux de l'environnement et de l'humain. Pour la même somme investie, des dizaines de métiers et des milliers d'emplois pourraient être créés dans une filière bois durable, l'écotourisme, la pêche responsable ou bien l'agriculture biologique. Les générations futures attendent mieux de vous qu'un tas d'or inutile comme héritage.

Tribune collective co-signée par José Bové, Karima Delli, Pascal Durand, Yannick Jadot, Eva Joly, Michèle Rivasi (eurodéputés Europe Écologie) et Michel Dubouillé (Secrétaire régional d'EELV Guyane et conseiller municipal de Matoury-.

Source : huffingtonpost.fr

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