Masques et gants : les animaux victimes d'une nouvelle pollution liée au Covid-19

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Des chercheurs ont établi une liste non-exhaustive des animaux ayant été victimes de l'utilisation de gants et de masques jetables par les humains.

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Un singe mange un masque anti-Covid en Malaisie. (Photo : Mohd RASFAN / AFP)

Depuis plus d'un an, le monde a adopté de nouvelles habitudes. Chacun sort avec un masque ou des gants en latex afin de se prémunir de la pandémie de Covid-19. Au-delà de la crise sanitaire, ces objets abandonnés après utilisation représentent une nouvelle forme de pollution particulièrement nuisible pour la faune sauvage. Face à ce phénomène, qui touche tous les continents, les scientifiques tirent la sonnette d'alarme et appellent le public à mieux gérer ces déchets. Dans une étude publiée le 22 mars dans la revue Animal Biology, des chercheurs néerlandais ont dressé une liste non-exhaustive des animaux victimes collatérales de la pandémie de SARS-CoV-2.  

Un petit retour en arrière s'impose. En 2019, les autorités chinoises détectent un nouveau coronavirus responsable de la mort de plusieurs dizaines de personnes. Dès mars 2020, l'OMS déclare que le monde est confronté à une pandémie. Rapidement, le port du masque, de gants ou de blouses devient nécessaire, voire obligatoire, dans l'espace public de nombreux pays. "On estime que nous utilisons chaque mois 129 milliards de masques et 65 milliards de gants dans le monde", remarquent les biologistes Auke-Florian Hiemstra du Naturalis Biodiversity Center et Liselotte Rambonnet de l'université de Leiden, à l'origine de cette étude. Conséquence : la pollution par ces protections à usage unique a bondi en un an, même dans les régions inhabitées comme par exemple les îles Soko, à Hong Kong. Au point de menacer l'existence de nombreux animaux qui ingèrent ces déchets ou, piégés par ces derniers, finissent par mourir d'épuisement.  

Auke-Florian Hiemstra et Liselotte Rambonnet révèlent ainsi que des singes ont été observés en train de mâcher des masques faciaux, que des oiseaux et des poissons se sont retrouvés piégés dans des gants en latex aux Pays-Bas, ou encore qu'un masque de protection a été retrouvé dans l'estomac d'un pingouin. Mais les scientifiques ont souhaité intégrer ces découvertes dans un contexte plus large. Elles ont donc épluché toutes les observations réalisées sur le sujet à travers le monde, via les médias sociaux, les journaux locaux, les sites d'informations, mais aussi via les photographes spécialisés, les ramasseurs de déchets, les ornithologues, ou les centres de sauvetage de la faune.

De nombreux exemples

L'une des premières preuves du risque que représentent les protections sanitaires pour les animaux remonte à août 2020 avec l'image d'une perche commune piégée par un gant. Seule la queue du poisson d'eau douce dépassait. Les chercheurs font également état des premières observations connues de l'utilisation de masque par différents oiseaux pour la nidification. "Ce comportement a d'abord été observé chez une foulque macroule (Fulica atra), une espèce connue pour ses nids anthropiques et nichant sur le canal Keizersgracht à Amsterdam, le 3 juin 2020", notent les scientifiques. Un autre nid de la même espèce a été repéré à Leyde. Il comprenait cette fois-ci un masque et un gant en latex.
Si cette espèce d'oiseaux utilisent à bon escient cette pollution, d'autres en pâtissent gravement. "La première victime signalée des déchets du Covid-19 dans le monde, à notre connaissance, était un merle d'Amérique (Turdus migratorius). Cet oiseau semble être mort après s'être emmêlé dans un masque facial à Chilliwack, en Colombie-Britannique, au Canada, le 10 avril 2020", indiquent les chercheuses. D'autres cas ont suivi.

Au-delà des oiseaux et des poissons, d'autres animaux souffrent de cette pollution : chauves-souris, renard roux, hérisson commun, crabes, pieuvres... Et la liste n'est pas complète. Au Brésil, un manchot de Magellan retrouvé sur une plage avait dans l'estomac un masque facial. Des macaques crabiers ont également été photographiés en train de mâchouiller des masques en Malaisie. Des chiens et des chats ont été hospitalisés après avoir ingéré des déchets médicaux liés au Covid-19. Bien entendu, les témoignages et observations ne suffisent pas à lister l'ensemble des interactions entre les animaux et la pollution sanitaire.  

Prise de conscience

Comment expliquer un tel phénomène ? "Les animaux s'affaiblissent parce qu'ils s'emmêlent ou meurent de faim à cause du plastique dans leur estomac. Les vertébrés et les invertébrés sur terre, dans l'eau douce et dans l'eau de mer s'emmêlent ou sont piégés dans les déchets du coronavirus", expliquent les deux auteurs du rapport.  

"Pour mesurer toute l'ampleur de ce problème", les auteurs de cette nouvelle étude encouragent les personnes à ajouter leurs observations d'animaux affectés par cette pollution sur le site www.covidlitter.com. Alors que la pandémie n'est pas encore derrière nous, les scientifiques jugent urgent de prendre conscience du danger que représentent cette nouvelle pollution trop souvent ignorée pour la faune sauvage.

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L'hélicoptère au lieu des remontées mécaniques : comment les riches ont skié en temps de Covid

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Fermeture des remontées mécaniques oblige, les skieurs les plus mordus et surtout les plus fortunés ont privilégié… l'héliski. Une pratique qui consiste à se faire déposer par hélicoptère au sommet d'une montagne avant de la dévaler. Pas vraiment donné à tout le monde.

héliski

L'hélicoptère doit se poser d'une minute à l'autre. En l'attendant, Philippe, doudoune bleue pétante sur le dos et chaussures de ski aux pieds, retrace à ses compagnons casqués et en combi quelques souvenirs d'une précédente expédition d'héliski, au Kamchatka. « Là-bas, c'était vraiment l'aventure. On volait dans de vieux hélicos de l'armée russe qui puaient le kérosène. Les pilotes étaient tous des anciens de la guerre d'Afghanistan. Et le décor… Fantastique. » Cette année, pandémie oblige, le chef d'entreprise ne peut pas s'offrir de périple à l'autre bout du globe, mais trouve son bonheur en vallée d'Aoste, en Italie.

Ce matin de mars 2021, sur l'héliport de Courmayeur, à la sortie du tunnel du Mont-Blanc, ils sont une quinzaine de skieurs à se payer le Graal, à s'envoler par petits groupes en direction des cimes enneigées, des glaciers et des vallées désertes. Déposés à 3 500 mètres d'altitude, ils auront la montagne pour eux, la plus belle des poudreuses, des descentes hors du monde et, surtout, un hélicoptère à disposition en guise de remontée mécanique. « C'est un privilège énorme, c'est un bonheur, poursuit Philippe. Mais on arrive au bout d'un cycle, je pense. On voit bien que ça pose quand même un peu problème pour la société d'aujourd'hui de prendre un hélico pour aller skier », concède-t-il, coupé par son guide qui signale l'arrivée imminente de l'appareil.

"Ils nous ont retiré les remontées, on prend l'hélico"

L’Écureuil – un hélicoptère léger, le même qui s'est posé au sommet de l'Everest en 2005 – surgit bruyamment, et se pose à quelques longueurs de bras des skieurs, genoux à terre et têtes courbées pour résister au souffle des pâles. Luca, le mécano, charge skis et bâtons dans le panier. Philippe et ses amis s'engouffrent à l'intérieur, se serrent à l'arrière. Porte fermée. Bref échange par radio, et l'hélico reprend son envol.

Huit minutes plus tard, c'est au tour de quatre copains, courtiers en assurances et fournisseurs pour des fonds d'investissement, de monter à bord. « Ils nous ont retiré les remontées, on prend l'hélico », se marre Bruno avant de vanter « le rêve de tout skieur ». Dernier groupe de la matinée : trois chirurgiens marseillais et un « futur golden-boy ». « C'est une clientèle fortunée, c'est sûr », glisse Jean-Charles, l'un des pilotes de la compagnie. « Mais c'est une clientèle respectueuse, qui aime réellement la montagne. Ce n'est pas des stars qui se paient un hélico pour faire n'importe quoi. L'héliski, c'est une pratique qui permet d'accéder très simplement à des endroits magnifiques, vierges. C'est comme le surfeur qui trouverait sa vague, sauvage, jamais surfée. Et ça, je crois que ça se défend. D'ailleurs on voit aussi des étudiants qui se saignent en quatre pour essayer. »

Une pratique plus courante dans les années 80

Pour une unique descente d'héliski, il faut compter plus de 400 euros par personne. Pour une journée complète, 1 000 euros. Une paille pour certains habitués, capables de se faire déposer en hélico-taxi depuis les pays voisins avant d'embarquer dans un appareil homologué pour la haute montagne.

Interdit en France par Valéry Giscard d’Estaing, pourtant très friand de la dépose en hélicoptère dans les sommets alpins jusqu'à se faire griller et pointer du doigt, l'héliski perdure de l'autre côté de la frontière, en Suisse et en Italie, occasionnant un drôle de jeu de saute frontière. Née au Canada au début des années 1970 - et aujourd'hui véritable industrie dans les Rocheuses où les hélicos, dans un ballet incessant, font office d’ascenseur vers les hauteurs -, la pratique n'a plus vraiment bonne presse en Europe. Si le « Far West des années 1980 », où les aéronefs pullulaient dans les stations, volaient et se posaient à peu près n'importe où, occasionnant un désordre monstre dans le massif, semble désormais complètement révolu au vu de la nouvelle législation et de l'encadrement, la pratique n'en est pas moins taxée d'anachronisme.

Une niche pour "de très bons skieurs avec des moyens"

« On paye les pots cassés d'une époque où c'était le Vietnam dans les montagnes », regrettent Jean-Charles et Marco, respectivement pilote et guide gestionnaire pour la compagnie italienne. « C'est sûr que c'est facile de taper sur l'héliski, c'est une cible symbolique. Mais je crois que c'est se tromper de combat, d'autant plus que ça reste extrêmement marginal. Mais on est dans une époque où tout est critiquable. Ok, ça fait du bruit. Mais où ça ? Dans des vallées où il n'y a personne. Si on travaillait comme des cow-boys, ça ne marcherait pas. Mais on fait les choses en bonne intelligence, il y a de la place pour tout le monde dans les Alpes. D'autant plus que les pilotes d'héliski sont les mêmes que ceux qui interviennent pour porter secours où faire vivre la montagne. »

Cet hiver, Kevin Gourgues, guide de haute montagne spécialisé dans l'héliski, habitué à s'aventurer avec des clients au Pakistan, en Alaska, en Islande ou dans l'Extrême-Orient russe, n'a pas pu emmener dans la poudreuse sa clientèle extra-européenne, refoulée aux frontières. Mais le téléphone sonne tout de même. « Beaucoup de gens qui n'ont clairement pas le niveau m'appellent juste pour prendre l'hélico car les remontées sont fermées… Eux, je ne les prends pas. L'héliski, c'est une activité de niche qui s'adresse à une clientèle particulière : de très bons skieurs avec des moyens. » « Je n'emmène pas les clients pour faire du manège mais pour qu'ils aient une expérience inoubliable », ajoute Quentin, un autre guide.

Interdit sur les pentes françaises, autorisé sur les pentes italiennes

D'autres compagnies sont moins tatillonnes, et acceptent volontiers des touristes avec un niveau de glisse médiocre, et les déposent dans des pentes plus accessibles, à condition de mettre le prix. « Il y a des gens qui sont tout à fait capables de se dire : tiens, il n'y a pas de remontée mais on pourrait prendre un hélico demain », caricature Hervé, guide basé à Courchevel, fin connaisseur des mœurs d'une clientèle aux portefeuilles bien remplis.

« Quand on est dans l'hélico, c'est beau. Et c'est chouette de se faire déposer sur sa montagne, c'est sûr », admet Vincent Neirinck, en charge du dossier « Silence » pour l'association Moutain Wilderness, très active sur le sujet de l'hélicoptère en montagne. « Mais ça ne va pas. Quelques-uns ne peuvent pas foutre en l'air le bonheur de tous les autres. La montagne, c'est un cadre exceptionnel qui implique des responsabilités » insiste-t-il, tout en reconnaissant l'utilité de l'hélicoptère en tant « qu'outil ». « Ce n'est pas pour rien que l'héliski est interdit en France. Même si la loi permet des choses absurdes selon que les pentes soient côté français ou italien… Et il n'y a pas que l'héliski ! Il y a tous les vols panoramiques et les hélicoptères qui servent de simple navette pour faire gagner du temps aux plus riches », accuse-t-il.
"Certes, ce n'est pas écolo"

Kévin Gourgues, lui, a renoncé à défendre son activité sur la place publique. « C'est un super bouc émissaire, très facile à pointer du doigt. Ce n'est pas un hasard si dans ce petit monde on en vient à se dire « pour vivre heureux, vivons cachés. » Certes, ce n'est pas écolo et on ne peut pas en faire l'apologie. Mais nous aussi on espère qu'un jour on pourra avoir des appareils plus discrets, électriques. »

En attendant, Jean-Charles se régale aux commandes de l’Écureuil. En survolant les traces matinales des skieurs qui serpentent en plein rêve au pied des Pyramides Calcaires, le Mont Blanc en arrière-plan, celui qui a piloté au service de scientifiques dans les coins les plus reculés de l'Arctique ou pour « la plus noble des missions : le secours » se dit que, tout de même, s'offrir un tel décor n'a pas de prix.
Source : Marianne.fr

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La Ville de Lyon va déclarer "l’état d’urgence climatique"

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A travers une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, la Ville de Lyon a annoncé ce mardi qu’elle allait déclarer "l’état d’urgence climatique" à l’occasion du prochain Conseil Municipal ce jeudi.

Dans cette vidéo, il est notamment dit que si rien n’est fait d’ici 7 ans, "Lyon fera face à de nombreux défis comme des canicules plus fréquentes, un climat similaire à celui d’Alger, des pluies plus rares et des risques de crises sociales". Toujours selon les services de la Ville, il faudrait "diminuer nos émissions de carbone de 40 % par rapport à 1990" à l’horizon 2030.

C'est pour atteindre cet objectif qu'un délibéré sera voté lors du Conseil Municipal ce jeudi. Il comprendra notamment un recadrage du "projet de programmation pluriannuelle des investissements (PPI)" autour des enjeux planétaires. Selon nos informations, plusieurs enveloppes budgétaires seront créées sur l'enveloppe de 1,2 milliard d'euros.
Ainsi, 40 millions d’euros iront pour l’amélioration des performances énergétiques des bâtiments municipaux. Même montant pour moderniser l’éclairage urbain et les véhicules publics. 80 millions d'euros (minimum) seront consacrés à la rénovation et à la transition écologique des bâtiments municipaux, tandis que 90 millions seront dédiés à la création de nouveaux espaces végétalisés.

Le maire de Lyon Grégory Doucet répondrait ainsi à l’appel d’Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU, qui souhaite que tous les décideurs nationaux et locaux redoublent d’efforts sur la question climatique.
Cette déclaration d’état d’urgence serait donc un mélange entre une prise de position claire et une multitude de mesures pour l’accompagner.
Quoi qu’il en soit, plusieurs élus écologistes tentent d’ores et déjà de donner de l’ampleur au #UrgenceClimatiqueLyon sur les réseaux sociaux.

 

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Hugo Clément au chevet des forêts françaises ravagées sur France 5

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Hugo Clément dénonce les champs d’arbres qui se développent au détriment des surfaces forestières naturelles. https://www.france.tv/france-5/sur-le-front/

À première vue, les massifs forestiers français semblent se porter à merveille. La preuve: depuis trente-cinq ans leur superficie est passée de quatorze à plus de 16 millions d’hectares. Soit un retour à une étendue comparable à celle du Moyen Âge. Derrière ce chiffre se cache pourtant une réalité alarmante. Voilà ce qu’explique le documentaire Sur le front des forêts, présenté, dans le cadre de sa collection consacrée à l’écologie, par un Hugo Clément, toujours aussi militant, mais également très convaincant.

Ce qui cloche dans les bois de l’Hexagone? Les coupes rases. Une technique d’abattage industrielle qui existait déjà dans les années 1980 et qui ne cesse de prendre de l’ampleur dans tout le pays. Des milliers d’hectares de forêts anciennes disparaissent ainsi chaque année. Ils sont ensuite remplacés par des champs de sapins douglas, plantés en rang comme des épis de maïs… De quoi fournir du bois calibré, sans défaut, parfait pour l’industrie.

Chênes centenaires transformés en granulés

Que deviennent les chênes ou encore les hêtres coupés par les énormes abatteuses à scies circulaires? Dans le Morvan, on suit Sylvain, ingénieur forestier qui milite pour l’interdiction des coupes rases. Le voilà, accompagné d’autres militants écologistes, dans une usine où sont traités ces arbres, avec parmi eux de nombreux chênes centenaires. Une réalité particulièrement choquante. D’autant plus qu’on découvre que ce bois est tout simplement transformé en granulés pour alimenter les poêles de particuliers. Et ces consommateurs sont persuadés d’agir pour le bien de la planète! Ces granulés sont en effet labellisés «développement durable» et leur production est subventionnée par l’État…

Outre la destruction de la biodiversité, qui accélère le réchauffement climatique, ces champs d’arbres ont entraîné une spécialisation des scieries, devenues de véritables usines qui ne peuvent plus traiter les essences anciennes. Les petites scieries disparaissent et les menuisiers sont contraints d’importer les chênes faute de pouvoir exploiter ceux de France qui pourraient l’être de façon responsable.
Mieux gérer la forêt, Mathias, bûcheron de 32 ans, le fait avec passion. Il a hérité d’un bois de son grand-père et il témoigne: «Il y a deux manières de voir ce patrimoine, soit comme un tas de fric, soit comme un écosystème.» Pour préserver son massif, il prélève chaque arbre avec le souci de donner plus de place et de lumière aux autres.

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À cause des humains, l’Amazonie émet plus de gaz à effet de serre qu’elle n’en absorbe

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L'Amazonie est au cœur d'une boucle climatique problématique en libérant davantage de gaz à effet de serre qu'elle n'en absorbe. En cause, les activités humaines telles que les constructions de barrage et les incendies provoqués par la déforestation.

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Les forêts tropicales sont des pièges à carbone, mais la destruction de leurs écosystèmes par l’être humain peut provoquer un dérèglement : elles libèrent alors plus de carbone qu’elles n’en retiennent. Qu’en est-il de la forêt amazonienne, colossal piège à carbone, d’une superficie de 500 millions d’hectares ?

D’autres gaz en cause que le carbone

Un vaste article de recherche, publié le 11 mars 2021 dans Frontiers in Forests and Global Change, démontre que la forêt amazonienne rejette maintenant autant, voire davantage de gaz à effet de serre qu’elle n’en absorbe. Bien que ce soit encore réversible, ce déséquilibre pourrait avoir comme effet d’aggraver le changement climatique.

Jusqu’à maintenant, les recherches se concentraient surtout sur les émissions de dioxyde de carbone (CO2) et, en la matière, l’Amazonie semblait toujours absorber davantage qu’elle n’en rejetait. Mais ce nouveau travail publié mi-mars étend la recherche à d’autres gaz que le carbone, et plus particulièrement le méthane (CH₄), ainsi que du protoxyde d’azote (N₂O). Résultat, l’équilibre actuel apparait bien plus fragile que ne le montraient de précédentes études.
«  Nous concluons que le réchauffement actuel dû aux agents non-CCO2 (en particulier le CH₄ et le N₂O) dans le bassin de l’Amazone contrebalance largement — et dépasse très probablement — le service climatique fourni par l’absorption du CO2 atmosphérique », estiment les auteurs de l’étude. Ce déséquilibre signifie non seulement que l’Amazonie ne peut plus aider à contrebalancer les émissions de gaz à effet de serre émises par les êtres humains ; mais qu’elle s’inscrit alors dans un cycle nourrissant le changement climatique.

Qui plus est, le réchauffement du climat accentue la boucle : « Des projections récentes suggèrent qu’une augmentation de la température de 4°C dans les zones humides tropicales d’Amérique du Sud pourrait doubler les émissions régionales de [méthane], déjà importantes », écrivent les auteurs. À mesure que le climat se réchauffe, l’Amazonie libère des gaz à effet de serre, qui contribuent à au réchauffement.

Les activités humaines au cœur du problème

Le constat n’est pas vraiment une surprise, mais il se trouve les raisons de ce déséquilibre sont à trouver dans les activités humaines et comment elles dérèglent l’écosystème du bassin de l’Amazonie.

Les auteurs citent de nombreux exemples, comme l’inondation consécutive à la construction de barrages : cela diminue les niveaux d’oxygène aquatique et augmente la décomposition anoxique de la matière organique, libérant des quantités importantes de méthane dans l’atmosphère. «  Cet effet est potentiellement 10 fois plus fort dans les systèmes tropicaux que pour les barrages en milieux tempérés », écrivent les scientifiques.

À cet exemple il faut ajouter les incendies causés par la déforestation effrénée et souvent illégale : les feux libèrent des gaz à effet de serre ; mais toute cette surface qui part en fumée représente aussi au long terme de la biomasse en moins pour absorber le dioxyde de carbone contenu dans l’atmosphère. En résumé, à cause de l’impact humain, l’Amazonie génère toujours plus de gaz à effet de serre, mais peut de moins en moins en absorber.

«  Après une décennie d’espoir d’une transition vers un modèle de développement durable, la déforestation rapide et le changement d’affectation des terres sont repris en Amazonie », regrettent les auteurs. Cette reprise des activités néfaste a «  recentré l’attention du public sur le sort des vastes stocks de carbone du bassin », mais, pour ces scientifiques, il est crucial d’élargir aux autres gaz à effet pour bien saisir tous les enjeux de «  la gestion de la biogéochimie du climat en Amazonie ».

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