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La fonte des glaces pourrait coûter jusqu'à dix crises financières

Publié le par Gerome

"Eh cap'tain! Iceberg droit devant!"


"comment matelot?"


"J'ai dit : Iceberg droit devant!"

"Il est à combien ton glaçon?"

"Oh, à vue de nez 3 ou 4 bornes"

"Bah, laissez faire. On sera encore à temps de voir tout à l'heure, ya pas le feu!"


Cette situation serait impenssable dans la réalité, pourtant l'humain fonce droit vers l'iceberg en se disant qu'il a encore un peu de temps. Mais lorsqu'il se rendra compte qu'il faudra manoeuvrer le navire pour éviter l'iceberg, il sera trop tard.

C'est ironique, c'est dramatique et c'est en même temps symptomatique (pour finir avec les rimes ique) de la race humaine.

 

Voici un très bon article du journal le Monde qui argumente de façon plus sérieuse ma comparaison :



Jusqu'à 28 000 milliards de dollars, soit 18 840 milliards d'euros, c'est ce que pourraient causer les dommages d'inondations dans plus d'une centaine de grandes villes côtières à la suite de la fonte des glaces en 2050, selon une étude (en anglais) publiée lundi 23 novembre par le WWF et l'assureur Allianz. Entretien avec Elise Buckle, chargée de l'énergie et du climat au WWF France.




Que recouvre ce chiffre de 28 000 milliards de dollars ?

En cas d'augmentation du niveau de la mer d'un demi-mètre d'ici à 2050, c'est la valeur des biens exposés à des inondations, des tornades, des destructions liées aux événements climatiques dans 136 villes portuaires dans le monde entier. On a beaucoup parlé de la crise financière et du sauvetage des banques, qui ont coûté 3 000 milliards de dollars (2 000 milliards d'euros). Là, on serait à 28 000 milliards de dollars. C'est donc presque dix fois plus que ce qu'a coûté la crise financière. L'idée était d'attirer l'attention des décideurs politiques mais aussi des investisseurs sur le fait que le coût du réchauffement climatique va être beaucoup plus important que celui de la crise financière.

Le rapport se concentre sur 136 villes. Parmi elles, quelles seront les villes les plus touchées ?


Les grandes villes américaines sont assez symboliques, mais les mégalopoles d'Asie sont au premier plan. Les villes qui sont le plus proche du niveau de la mer en terme d'altitude sont les plus menacées. En général, elles sont également très peuplées et une grande partie de leur population est très vulnérable. C'est le cas, par exemple, au Bangladesh ou en Inde, où énormément de personnes ont quitté la campagne pour s'entasser dans des bidonvilles près de la mer.

Ces personnes ont très peu de moyens pour s'adapter, pour faire face en cas de montée des eaux, en cas de catastrophe naturelle ou pour déménager. Dernièrement, nous avons publié un classement des mégalopoles asiatiques selon leur degré de vulnérabilité au changement climatique. Quasiment toutes sont situées près de la mer.

Un zoom est fait sur les villes du Nord-Est américain. Pourquoi ?

L'idée était de montrer que, dans une ville comme New York, le réchauffement climatique pourrait avoir des effets dévastateurs, beaucoup plus que le 11-Septembre par exemple. On s'est intéressé à Baltimore, Boston, New York, Philadelphie et Providence. S'il y a une augmentation du niveau de la mer de seulement 0,65 m d'ici à 2050, on estime que le coût de l'exposition des biens dans ces quatre villes se situera entre 1 300 et 7 400 milliards de dollars. C'est vrai qu'avec la crise économique il est difficile, pour le moment, pour le président Obama de s'engager sur le climat alors que beaucoup d'Américains ont perdu leur emploi ou n'ont plus de maisons. A très court terme c'est très difficile à vivre, mais à long terme la catastrophe risque d'être beaucoup plus grave.


Que peut-on faire ?


On cherche des solutions compliquées, comme la séquestration du carbone pour les usines, mais la nature nous propose aussi des solutions beaucoup plus simples. Il faudrait investir beaucoup plus dans certains eco-systèmes qui peuvent jouer le rôle de protection naturelle. Par exemple, quand il y a eu le tsunami en Asie en 2005, on a remarqué que les mangroves avaient joué un rôle très important pour protéger les habitations et les gens qui étaient au bord de la mer. Il faudrait donc restaurer les mangroves, les replanter. On pourrait aussi parler du rôle de la forêt, qui nous offre des services sans limites et quasiment gratuitement. A long-terme, c'est là qu'il y a des solutions durables.


Dans le cas du Nord-Est américain, il faudra mettre en place des solutions beaucoup plus radicales pour relocaliser progressivement les populations et les infrastructures. Mais il faudrait le faire dès maintenant car ça coûtera beaucoup plus cher de réparer après coup.


Dans son rapport sur l'évaluation des coûts économiques du changement climatique, Nicholas Stern a expliqué que si l'on agit maintenant, ça nous coûtera environ 1 % du PIB mondial. Si l'on ne fait rien, il estime que cela va nous coûter environ 20 % du PIB mondial. C'est aussi une leçon pour l'humanité pour réfléchir à la façon dont on va construire les villes de demain afin qu'elles soient mieux intégrées dans leur environnement naturel.

 

Bon, tout ça c'est très bien. Pour prendre nos décideurs par les sentiments il suffit de de leur parler pognon, en général, il y a une réaction. Cette étude est limpide et il faudrait être un abruti profond pour ne pas suivre ces conseils à la lettre. Cependant, je pense que personne ne va rien faire, en restant le plus objectif possible.

Les bénéfices du PIB sont utilisés pour la recherche militaire, spatiale, pour entretenir une armée de connards en Afghanistan et en Irak alors que les vrais besoins urgents sont ignorés purement et simplement!

Voilà la race humaine.

 

Cet ours qui s'apprête à mourir vaut tous les PIB du monde.

 


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Le CREA sur France 3

Publié le par Gerome

A l'occasion du sommet de Copenhague, France 3 a réalisé un reportage sur l'impact du changement climatique en montagne. Vous pourrez y retrouver le CREA parmi de nombreux autres intervenants.

L'émission sera diffusée sous différents formats dans les jours et mois à venir :
- Jeudi 26 Novembre : présentation de Phénoclim au Journal Télévisé
- Samedi 28 Novembre à 15h25 : émission de 52 minutes "alerte sur les glaciers" diffusée au niveau national
- Dans les mois à venir, une version longue du reportage sera diffusée dans "Chroniques d'en haut", nous vous tiendrons informés quand nous aurons la date.



Observatoire du Mont-Blanc
74400 Chamonix

TEL: 33+(0)4 50 53 45 16
floriane@crea.hautesavoie.net
www.crea.hautesavoie.net

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La pénurie d'électricité en France est inévitable

Publié le par Gerome

- Si la pénurie n'est pas pour cet hiver, ce sera pour les suivants
- Depuis 5 ans, c'est l'électricité allemande qui sauve la France
- C'est l'échec de l'option française "nucléaire + chauffage électrique"

 
 
Le Réseau "Sortir du nucléaire" appelle l'opinion publique française à prendre acte de la faillite de l'option nucléaire française qui, outre les graves problèmes de déchets radioactifs ou de vulnérabilité des réacteurs nucléaires comme l'EPR, va aboutir à une véritable pénurie de courant en France. En effet, les coupures d'électricité en France sont inévitables, que ce soit dès cet hiver (si les températures sont basses) ou les années suivantes. La situation va d'ailleurs s'aggraver inexorablement du fait de trois phénomènes dont les conséquences se cumulent :
 


1) Le vieillissement et l'usure prématurée des réacteurs nucléaires français

Les réacteurs nucléaires français atteignent l'un après l'autres 30 ans de fonctionnement, c'est-à-dire leur durée de vie prévue à l'origine (1). Certes, EDF entend continuer à faire fonctionner ces réacteurs, mais ils vont être de plus en plus souvent en panne (sans parler du risque d'un accident grave). De plus, les réacteurs nucléaires français sont bien plus usés que des réacteurs du même âge dans d'autres pays car la prédominance du nucléaire dans la production électrique française (80%) obliger EDF à utiliser les réacteurs "en suivi de réseau" (c'est-à-dire en suivant les variations de consommation dans la journée et sur l'année), ce qui les use prématurément. (2)
 


2) L'augmentation continue du nombre de chauffages électriques

Alors que les réacteurs nucléaires français vont être de plus en plus souvent arrêtés, la consommation d'électricité ne cesse d'augmenter, en particulier en hiver du fait de la politique insensée de développement du chauffage électrique, imposée par l'Etat et EDF pour "justifier" le nucléaire : actuellement et depuis des années, 80% des nouveaux bâtiments sont chauffés à l'électricité (3). Il en résulte que, chaque hiver, les consommations d'électricité battent des records et dépassent très largement les capacités nationales de production. A quoi bon avoir 58 réacteurs nucléaires si c'est pour devoir importer massivement de l'électricité ? Notons aussi, si nécessaire, que la construction de réacteurs nucléaires supplémentaires ne répond en rien au problème : utiliser des réacteurs seulement l'hiver, et les laisser arrêtés le reste de l'année, ruinerait EDF en peu de temps.

 

3) La réduction des périodes permettant la maintenance des réacteurs

Traditionnellement, c'est en été que EDF programmait prioritairement les opérations de maintenance dans les centrales nucléaires, du fait le la consommation modérée d'électricité en cette période. Mais les canicules 2003 et 2006 ont totalement remis en cause cette pratique : non seulement la consommation d'électricité a été importante du fait de l'essor des climatiseurs, mais il a aussi fallu faire fonctionner à bas régime ou même arrêter les réacteurs disponibles, du fait de la difficulté voire l'impossibilité de les refroidir correctement.
Du coup, désormais, c'est seulement au printemps et en automne que EDF peut programmer la majorité des opérations de maintenance (4), ce qui implique une grande vulnérabilité : si des évènements imprévus (incidents, grèves, etc) viennent perturber les prévisions et décaler les opérations de maintenance, EDF se retrouve rapidement avec trop de réacteurs arrêtés en hiver ou en été.



Conséquences
 
L'option imposée en France, "centrales nucléaires + chauffages électriques", se traduit par des importations d'électricité de plus en plus fortes, par la production de déchets radioactifs ET de fortes émissions de co2, et par une dépendance énergétique plus élevée que jamais.
 


- Depuis 5 ans, c'est l'Allemagne qui est exportatrice d'électricité vers la France
 
On entend souvent dire "L'Allemagne sort du nucléaire… mais en achetant l'électricité nucléaire française". C'est totalement faux. Depuis 2004, c'est bien l'Allemagne qui est exportatrice nette d'électricité vers la France : 8,7 TWh en 2004, puis 9,7 TWh en 2005, puis 5,6 TWh en 2006, et 8,2 TWh en 2007, et carrément 12,6 TWh en 2008 (5), c'est-à-dire environ la production annuelle de deux réacteurs nucléaires. Il est d'ores et déjà avéré que, pour 2009, les importations depuis l'Allemagne seront encore plus élevées.
C'est donc bien le pays qui sort du nucléaire qui, tous les hivers, sauve le pays du nucléaire
. Mais l'augmentation insensée de la consommation électrique française fait que, à brève échéance, l'Allemagne ne pourra plus sauver la France nucléaire, qui va donc être frappée par des pénuries, et ce peut-être dès cet hiver si les températures sont basses.
 


- La France produit des déchets radioactifs ET émet beaucoup de co2
 
Il est de bon ton de critiquer les centrales allemandes au charbon, "fortement émettrices de co2", mais le fait est que ce sont elles qui, tous les hivers, alimentent une bonne partie des chauffages électriques français. Il serait d'ailleurs parfaitement logique d'attribuer à la France les émissions allemandes de co2 correspondant à l'alimentation des chauffages électriques français.
Il faut prendre acte de ce que l'option imposée en France, "centrales nucléaires + chauffages électriques", se traduit par la production de déchets radioactifs ET par de fortes émissions de co2. Ces données sont reconnues par un document récent du Réseau de transport de l'électricité (RTE) et de l'ADEME (6). C'est un échec total.
 


- La France est de plus en plus dépendante sur le plan énergétique
 
En 2008, la France a certes gagné 2 milliards d'euros en exportant de l'électricité, mais elle a surtout dépensé 61 milliards pour importer du pétrole et du gaz (7). C'est la preuve que, même poussé à son maximum, le nucléaire n'empêche pas la dépendance aux énergies fossiles. Il est donc faux de prétendre, comme on l'entend trop souvent dire, que "le nucléaire donne à la France son indépendance énergétique".
Qui plus est, la France exporte de l'électricité lorsque les prix sont bas et elle en importe (massivement) lorsque les prix sont très élevés, en particulier en hiver. Au vu de l'augmentation des importations françaises en hiver, il est clair que, sous peu, la France dépensera plus d'argent en achetant de l'électricité qu'elle n'en gagnera en en vendant.
 

Conclusion
 
Il est grand temps que les citoyens français prennent connaissance de la réalité des données, qui est exactement inverse des idées reçues entretenues dans l'opinion par les publicités d'EDF et d'Areva et par les discours des dirigeants politiques. Non, la France n'a aucune indépendance énergétique. Non, ce n'est pas l'Allemagne qui est dépendant de l'électricité française, c'est l'inverse. Oui, la France est menacée par une véritable pénurie d'électricité. Oui, la France est à la fois productrice de déchets radioactifs ET fortement émettrice de co2.
La solution passe par une remise en cause urgente de la consommation démesurée d'électricité en France, en particulier par une remise en cause de l'option du chauffage électrique, et par une politique ambitieuse d'économies d'énergie et de développement des énergies renouvelables.
 

Références

(1) Le quotidien Le Monde du 15 mai 2003 a rappelé que "les décrets d'autorisation ne précisaient pas la durée de vie des centrales" mais que "les dossiers d'autorisation présentés par EDF avançaient une durée d'exploitation de trente ans".

(2) Dans un courrier adressé à EDF le 17 février 2003, l'Autorité de sûreté nucléaire écrivait "EDF a souhaité faire fonctionner certains réacteurs en base, d'autres se trouvant donc davantage soumis au suivi de réseau ; certains aléas techniques, notamment les problèmes de dégradation du combustible sur des réacteurs de 1300 MW, ou des problèmes d'ordre neutronique, ont amené d'autres réacteurs à ne pouvoir fonctionner en suivi de réseau, ce qui a pu encore davantage concentrer ce mode de fonctionnement sur certains réacteurs. Je vous demande de m'indiquer l'analyse que vous faites de l'impact de ce fonctionnement du parc sur la sûreté des centrales, et en particulier sur les réacteurs assurant l'ajustement de la production à la demande."

(3) EDF a signé le 28 mai 2001 avec MISA ( premier constructeur de maisons individuelles avec 10 marques dont Maisons Phénix, Maisons Familiales, Maisons Mamet), un accord pour imposer le chauffage électrique dans 80% des nouvelles habitations.

(3 bis) "Près de 30% des logements étaient équipés de chauffage électrique en 2006, contre environ 2% trente ans plus tôt. Et la tendance s'accentue, la majorité des nouvelles habitations étant chauffées à l'aide de convecteurs." (AFP, 31 octobre 2009)

(4) "Le changement le plus notable depuis 2003 concerne sans doute les arrêts des différentes tranches nucléaires. Désormais, EDF s'efforce en effet d'en programmer le moins possible pendant les mois d'été" (Les Echos, 5 juillet 2006)

(5) http://www.rte-france.com/htm/fr/mediatheque/telecharge/statistiques_annuelles_2008.pdf

(6) http://www.sortirdunucleaire.org/dossiers/CO2-Chauffage-electrique-RTE-Ademe.pdf

(7) http://www.developpement-durable.gouv.fr/energie/statisti/pdf/facture-2008.pdf pièce jointe document texte brut (message-footer.txt)

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Je suis vert de colère!

Publié le par Gerome




Voici une très belle chanson de Pierre Perret, le ton est enjoué mais les paroles bien dures et bien tristes :

{Refrain:}
Je suis vert, vert, vert,
Je suis vert de colère
Contre ces pauv'typ's
Qui bousillent la terre,
Cette jolie terre
Que nos pères, nos
grands-pères
Avaient su préserver
Durant des millénaires.

Les rivières écument.
Les usines fument.
Les moutons mang' leurs papas
Changés en granulés.
Les déchets ultimes,
La vach'folle en prime,
Sont un p'tit cadeau du ciel
De nos industriels.

{Refrain}
Je suis vert, vert, vert,
Je suis vert de colère
Contre ces pauv' typ's
Qui bousillent la terre.

De Brest aux Maldives,
Vont à la dérive
Des poubell's radio-activ's
Jusqu'au fond des lagunes
Et, mêm' sans tapage,
Des maires de village
En enterr' dans leur commun'
Pour faire entrer des thunes.

{Refrain}
Je suis vert, vert, vert,
Je suis vert de colère
Contre ces pauv' typ's
Qui bousillent la terre.

Les blés, les patates
Sont bourrés d'nitrates.
On shoote aussi bien les veaux
Qu' les champions haut-niveau.
On s'fait des tartines
Au beurr' de dioxine.
En voiture, on a l' point vert
Pour doser nos cancers.

{Refrain}
Je suis vert, vert, vert,
Je suis vert de colère
Contre ces pauv' typ's
Qui bousillent la terre.

Sous la couch' d'ozone,
L'oxyd' de carbone
Tue nos forêts si précieus's
Autant qu'les tronçonneus's.
L'air pur s'amenuise.
Nos sources s'épuisent
Mais colorants, salmonelloses
Nous font la vie en rose.

{Refrain}
Je suis vert, vert, vert,
Je suis vert de colère
Contre ces pauv' typ's
Qui bousillent la terre.

Pour qu'y ait pas d'panique,
Leurs poisons transgéniques,
Ils les nomment "sciences de la vie"
Ou "biotechnologies".
Leur's gènes font la nique
Aux antibiotiques.
Pour guérir nos infections,
Faudra d'l'inspiration.

{Refrain}
Je suis vert, vert, vert,
Je suis vert de colère
Contre ces pauv' typ's
Qui bousillent la terre.

Tous les ans, bonhomme,
Sept milliards de tonnes
De gaz mortel CO2
S'envolent dans les cieux.
L'effet d'serr'menace.
Ça fait fond' les glaces.
La mer mont' : c'est sans danger,
Y aura qu'à éponger.

{Refrain}
Je suis vert, vert, vert,
Je suis vert de colère
Contre ces pauv' typ's
Qui bousillent la terre.
Il y a ceux qui chantent
La chanson du profit
Contre tous ceux qui aiment
La chanson de la vie


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Lumière sur : la Z.D.M des deux Corées

Publié le par Gerome


La Guerre froide s’est brièvement réchauffée entre 1950 et 1953 quand le centre de la péninsule coréenne fut dévasté par un conflit sauvage. Une Corée du nord envahissante, soutenue par la Russie et la Chine communistes, dut faire face à la résistance sud-coréenne, soutenue par les Nations Unies avec principalement des troupes américaines. La guerre fut interrompue par une trêve - il n’y a toujours pas de traité de paix - et un no man’s land a été créé pour séparer les troupes ennemies.
Cette étendue de terre fortement minée et étroitement surveillée constitue la zone démilitarisée (ZDM). Pendant 51 ans, les hommes ont été tenus à l’écart de la majeure partie de cette zone. La ZDM coréenne est la terre de repos sacrée des soldats et autres victimes de guerre. Le peuple coréen a payé un lourd tribut et la ZDM représente la mémoire de cette tragédie. Préserver cette particularité est donc spirituellement important.

De plus, cette conservation est tout aussi importante d’un point de vue écologique. L’exclusion des hommes de la ZDM a permis que s’y produise une expérience avec la nature tout aussi extraordinaire qu’inattendue. Dans ce couloir large de quatre kilomètres et traversant la péninsule sur 250 kilomètres, de luxuriants habitats sauvages ont refait surface là où la guerre avait tout détruit. La terre en jachère située dans la section occidentale s’est transformée en de denses prairies et en bosquets d’arbustes feuillus. Des forêts vertes et abondantes ornent les chaînes montagneuses orientales. Des espèces végétales et animales menacées y ont trouvé refuge. La faune et la flore y sont abondantes : des ours noirs d’Asie, des léopards, des cerfs musqués, des gorals d’Amour (chèvres des montagnes d’Asie, vivant de l’Himalaya à l’Amour) et des phoques tachetés ont été aperçus. Certaines personnes pensent qu’il y a aussi des tigres sibériens.


Ours noir d'Asie

D’après George Archibald, de la Fondation internationale Crane, une variété rare de grues serait revenue dans la ZDM : il se pourrait que presque la moitié des 2000 grues du Japon au monde ainsi que des grues à cou blanc, presque aussi rares, séjournent dans la zone. Des 1000 petites spatules qui subsistent encore à travers le monde, 90% se reproduisent dans la ZDM. Il fut un temps où l’ibis nippon y habitait et il peut être aujourd’hui réintroduit depuis la Chine où la volée atteint désormais plusieurs centaines de têtes. Environ 1000 vautours moines, et probablement quelques pics à ventre blanc de Corée vivent aussi dans la ZDM. La cigogne blanche, qui a presque disparu au Japon, survit en Corée.

Grue du Japon

La protection de ces oiseaux migrateurs ne concerne pas que la Corée. Un expert a récemment écrit que « avec la possible réunification entre les deux Corées, la ZDM pourrait devenir le point névralgique des questions de conservation en Asie. L’éventuelle perte de l’habitat, essentiel aux espèces menacées qui en sont devenues dépendantes, représente une grande menace ». Pour les experts des écosystèmes, la ZDM est un laboratoire unique où l’on peut étudier la reconquête de la nature. Pour les deux Corées, elle représente la dernière occasion de rétablir une certaine biodiversité sur leurs terres. Les deux nations ont été fortement indifférentes à leurs écosystèmes, détruisant beaucoup d’espèces qui subsistent dans la ZDM.

Bien que les experts n’aient pas eu accès à la zone même, ils ont obtenu assez de preuves pour estimer que la zone et les terrains partiellement protégés alentour (la zone civile de contrôle, une ceinture agricole ouverte par endroits pour raisons de défense) accueillent 52 espèces de mammifères, 201 espèces d’oiseaux, 28 reptiles amphibiens, 67 espèces de poisson d’eau douce et 1194 espèces végétales. Certaines de ces espèces se retrouvent en grand nombre dans le reste du monde mais d’autres - comme les grues - sont rares et menacées.


En plus de la protection des espèces, la ZDM et les zones civiles de contrôle contiguës sont d’une beauté saisissante. Cinq rivières traversent la zone, une ressource vitale pour l’avenir de tous les Coréens. La hauteur des montagnes varie entre 700 et 1600 mètres. La forêt abrite des arbres à feuilles caduques et des conifères, protégeant des lignes de partage des eaux qui débouchent dans la mer Jaune à l’ouest. Il y a des lacs, des lagons, des dunes de sable, des vasières et des terres marécageuses.

La ZDM est aussi une source importante d’eau douce et d’air pur. Le contraste est saisissant entre la qualité de l’air de la zone et celle du reste du pays. De plus en plus de Sud-Coréens veulent combattre la pollution de l’air et de l’eau que cause la rapide industrialisation du pays et l’opinion publique est très favorable à la conservation de la ZDM comme réserve d’eau et d’air purs. Ce remarquable refuge naturel, unique en son genre, a été préservé car les deux Corées sont toujours en guerre, des soldats armés patrouillent encore des deux côtés et des mines menacent les envahisseurs. Mais que se passera-t-il quand l’armistice vieux de 51 ans se transformera en traité de paix ? Il est alors probable que les forces empressées et opportunistes du développement économique revendiqueront un morceau de cette terre « inutilisée ».


Et le moment fatidique est imminent. Malgré l’impasse entre les Etats-Unis et la Corée du Nord concernant la revendication coréenne de posséder des armes nucléaires les deux Corées ont déjà bien avancé en ce qui concerne la ZDM. Ces discussions ab
outiront sur un accord décidant du futur de cette zone. Deux lignes de chemin de fer et deux autoroutes sont déjà en voie de reconstruction dans ce couloir.


Le goral d’Amour, un animal entre la chèvre et l’antilope, menacé d’extinction. L’homme qui apprécie sa chair et fabrique des médicaments à partir des ses organes est son principal ennemi.

Ironiquement, cet avant-dernier pays communiste au monde a autorisé Hyundai, une multinationale, à contrôler le tourisme dans son magnifique parc national. Les voitures seront bientôt autorisées sur les routes traversant la ZDM. Des agriculteurs nord-coréens ont planté des cultures dans la ZDM au bord de l’autoroute de l’est et des maisons y ont été construites. La zone est aussi menacée par l’intense trafic ferroviaire qui revient beaucoup moins cher et est plus rapide pour le fret que la voie océanique. Une réconciliation accrue entre le Nord et le Sud augmenterait probablement le trafic maritime sur la rivière Han qui traverse la ZDM et viendrait menacer l’habitat des grues à cou blanc. Les écologistes du monde entier se mobilisent pour protéger l’écosystème de la ZDM et pour persuader les deux gouvernements qu’ils gagneraient plus à conserver la zone qu’à la bétonner et à l’urbaniser. Mais en auront-ils le temps ?

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