Depuis le XIXe siècle, notre pays a presque doublé sa surface forestière. Mais quelle forêt ? Défenseurs de l’environnement, propriétaires et agents forestiers se mobilisent contre les méthodes de l’office national des forêts.
Il y a neuf ans, Michelle M. a hérité d’une centaine d’hectares de bois en Poitou. L’année suivante, mauvaise surprise : un gestionnaire forestier, agréé par l’Office national des forêt, vient… couper à ras une dizaine d’hectares, dont 180 chênes centenaires ! Michelle découvre ainsi qu’elle a également hérité d’un plan de gestion de la forêt, obligatoire pour toute propriété de plus de 25 hectares sauf à rentrer dans des procédures compliquées pour vendre du bois et à perdre les avantages fiscaux sur les droits de succession et l’impôt sur la fortune. Elle accepte de mauvaise grâce.
Deux ans plus tard, les tronçonneuses sont de retour. Michelle proteste et propose que l’on pratique au moins une coupe sombre (on ne coupe que quelques arbres de façon à ce que la lumière n’atteigne pas directement le sous-bois). Refus du forestier : ça prendrait trop de temps, il est plus rentable que les engins coupent tout là où ils sont. "J’apprends par la même occasion que mes chênes ne sont pas destinés à l’ébénisterie mais au bois de chauffage. Je dois “nettoyer” le sol de tous les noisetiers et autres arbustes, et replanter des espèces qui produiront des troncs les plus hauts possibles, sans branches basses pour éviter les nœuds qui gênent les industries du bois."
Michelle se rebiffe, prend contact avec des associations et propose un plan de sénescence qui vise à préserver la forêt en la laissant évoluer. Mais les experts forestiers ne l’acceptent que pour 20 % de la propriété… La propriétaire poitevine vient de découvrir ce que l’ONF, appelle "la sylviculture dynamique". Une industrialisation de la forêt contre laquelle s’élèvent de plus en plus défenseurs de l’environnement, propriétaires et agents de l’ONF...
Il faut 16 kilos de protéines végétales pour obtenir 1 kilo de protéines de bœuf. Il faut 7 kilos de protéines végétales pour obtenir 1 kilo de protéines de porc. Il faut 5 kilos de protéines végétales pour obtenir 1 kilo de protéines de poulet. Il faut 5 kilos de protéines végétales pour obtenir 1 kilo de protéines d’œuf.
56% de la production mondiale des protéines végétales est utilisée pour le bétail.
Aux Etats-Unis, les animaux mangent 70% des céréales pour produire du lait, des œufs et de la viande. En Europe, ils en mangent environ 60%. En Inde, seulement 2%.
En France, au moins la moitié des terres agricoles est utilisée à grand renfort de produits chimiques de synthèse dans le but de produire des végétaux pour les élevages. 80% des productions de soja, maïs, pois sont destinées à nourrir le bétail.
Lorsqu’on abat un bœuf, il fournit juste 200 kilos de viande pour la consommation des humains, soit 1500 repas, mais avec les céréales qu’on lui a donné, on aurait pu servir 18000 repas.
Si l’on voulait satisfaire les 6 milliards d’humains sur terre avec une alimentation à l’américaine (ou à l’européenne), il faudrait 2 à 2,5 fois plus de céréales que le monde entier n’en produit actuellement. Et toutes les réserves actuelles de pétrole seraient épuisées en moins de 50 années.
L’agriculture est le secteur d’activité qui utilise le plus d’eau de captage. Ainsi, la production d’un kilo de viande nécessite entre 10 000 et 24 000 litres d’eau, tandis que la production d’un kilo de céréales, par exemple, n’en demande que 250 à 1 200 litres. Cette contribution peut donc devenir des dizaines de fois moins lourde si on arrête le gaspillage consistant à transformer de la nourriture végétale en produit animal.
Près de 8.000 kilomètres carrés de forêt ont été rasés entre août 2017 et juillet 2018 au Brésil, le plus grave bilan en la matière depuis dix ans.
L'équivalent de près d'un million de terrains de foot. Le Brésil a perdu 7.900 kilomètres carrés de forêt entre août 2017 et juillet 2018, selon des chiffres du ministère de l'Environnement obtenus sur la base d'observations satellites. Un niveau de déforestation 13,7% supérieur à celui de l'année dernière, et le plus élevé depuis 2008, rapporte le Guardian. Les défenseurs de l'environnement dénoncent cette situation, mais redoutent de la voir s'aggraver davantage à la suite de l'élection à la tête du pays de Jair Bolsonaro, qui revendique des positions climato-sceptiques.
"Renforcer la mobilisation à tous les niveaux". Le ministère de l'environnement a indiqué que cette accélération de la déforestation était survenue alors que les budgets pour lutter contre le phénomène avaient augmenté, et que les actions pour l'environnement s'étaient intensifiées. "Nous devons renforcer la mobilisation à tous les niveaux du gouvernement, de la société civile et du secteur privé pour combattre les activités violant les lois environnementales", a exhorté le ministre Edson Duarte. Mais le nouveau gouvernement semble prendre la direction opposée.
Après avoir constamment diminué jusqu'en 2013, la déforestation est repartie à la hausse cette année-là, à la suite d'une mesure d’amnistie prise par le gouvernement de Dilma Rousseff concernant les petites propriétés. Son successeur, Michel Temer, a lui aussi pris des mesures favorables à l'industrie agro-alimentaire, au détriment de la protection de l'environnement. Face à des dispositions autorisant les industriels à raser les forêts d'Amazonie, la hausse des moyens alloués au budget de l'écologie n'a pas pesé lourd.
En raison du dérèglement climatique et de l’épuisement inéluctable de nos ressources naturelles, la collapsologie - un courant de pensée qui tente d’examiner l’état de la planète - prédit un effondrement de nos sociétés industrielles d’ici quelques années. Une vision angoissante de l’avenir qui va jusqu’à poser la question de la survie de l’homme sur Terre. Explications.
A quoi ressemblera le monde dans 10, 20 ou 30 ans ? Vaste question sur laquelle chacun sera libre de projeter sa propre vision de l’avenir. Néanmoins, compte-tenu du dérèglement climatique et ses conséquences désastreuses, de l’érosion plus qu’alarmante de la biodiversité et de l’accroissement démesuré des inégalités à l’échelle mondiale, il est bien difficile, pour ne pas dire impossible, d’apporter une réponse réjouissante à cette interrogation.
Depuis plusieurs années, certains écologistes prétendent même que le pire est à prévoir. Que nos sociétés vivent sans doute leurs derniers instants de confort et d’insouciance avant d’être prochainement rattrapées par une réalité que l’on refuse pour l’instant d’entrevoir. En 2002, lors du IVe sommet de la Terre à Johannesburg, Jacques Chirac avait prononcé cette phrase restée célèbre : "Notre maison brûle et nous regardons ailleurs". Ce constat, déjà partagé à l’époque, est malheureusement toujours d’actualité.
Fondamentalement, rien ou presque n’a été fait pour éteindre l’incendie et c’est pourquoi la situation est encore plus grave aujourd’hui, si l’on se fie aux recherches et aux données sur l’état de la planète, unanimement catastrophistes. C’est sur la base de ce terrible diagnostic qu’est née la collapsologie. Ce néologisme, créé à partir du verbe anglais to collapse (qui signifie s’effondrer), désigne un courant de pensée qui juge inévitable l’effondrement de nos sociétés tel que nous les connaissons.
Une Terre au bord de la rupture
A travers une approche transdisciplinaire qui va de l’économie à la biologie en passant par la psychologie, la collapsologie cherche à examiner l’état du monde, des modifications profondes actuellement en cours et les conséquences de celles-ci. Inventé "avec une certaine autodérision" par les chercheurs Pablo Servigne et Raphael Stevens, le terme de collapsologie ne fait pas l’unanimité au sein de cette communauté dans laquelle gravitent beaucoup de chercheurs. Ceci dit, en dépit de ce petit désaccord sémantique, tous sont d’accord pour considérer que nos sociétés, et en particulier les dirigeants politiques, ne prennent pas la mesure du péril qui nous menace.
Pour mesurer l’état de santé de la planète, une équipe de chercheurs internationaux a forgé en 2009 la notion de "limites planétaires". Il s’agit d’indicateurs à ne surtout pas dépasser pour que "le système Terre ne bascule dans un état très différent (de l’actuel), probablement bien moins favorable au développement des sociétés humaines". Leur étude publiée à l’époque dans la revue Nature a été actualisée en 2015. Et sur les 9 indicateurs proposés (dont 6 seulement sont mesurables), 4 ont déjà franchi un seuil dramatique (augmentation de la température terrestre, chute brutale de la biodiversité, perturbation des cycles biogéochimiques de l’azote et du phosphore et modification de l'usage des sols).
Quand l’Anthropocène remplace l’Holocène
Autrement dit, les activités humaines depuis la révolution industrielle sont telles qu’elles sont parvenues à bouleverser les cycles naturels de la Terre, qui évoluent traditionnellement sur une échelle de temps extrêmement longue. Depuis environ 11.000 ans, notre planète est entrée dans une époque géologique baptisée l’Holocène. Celle-ci se caractérise en particulier par un adoucissement du climat qui a favorisé le développement des civilisations humaines.
Or, c’est précisément cet équilibre qui est aujourd’hui menacé. A tel point que certains scientifiques estiment qu’en raison des bouleversements systémiques actuellement observés, nous serions entrés dans une nouvelle époque géologique, baptisée l’Anthropocène. Et personne ne peut dire si l’Homme est véritablement prêt à supporter une telle évolution de la planète.
Edouard Philippe, collapsologue ?
Cela fait plusieurs décennies que certains esprits éclairés tirent la sonnette d’alarme. Citons par exemple le rapport Meadows (1972) qui prédit un probable effondrement de nos sociétés industrielles pour la première moitié du XXIe siècle si un frein n’est pas mis à notre modèle de développement. Ou encore la publication de Principe responsabilité du philosophe allemand Hans Jonas (1979, traduit en français en 1991) qui s’inquiétait de la capacité des hommes à garantir un monde sain aux générations futures.
D’autres ouvrages ont suivi comme celui du biologiste et géographe américain Jared Diamond, Collapse (2005), devenu l’une des bibles des collapsologues. En comparant la manière dont plusieurs sociétés ont disparu, l’auteur en conclut que l’incapacité à s’adapter à son environnement entraîne un effondrement inéluctable des sociétés, y compris des plus robustes. La thèse de ce livre, qui a connu un succès international, est allée jusqu’à convaincre Edouard Philippe du risque d’effondrement qui plane sur le monde. "Cette question est assez obsédante, elle me taraude beaucoup plus que certains peuvent l’imaginer", a avoué le Premier ministre en juillet dernier lors d’un Facebook live en compagnie de Nicolas Hulot, qui était encore ministre de la Transition écologique.
Une confession qui n’a cependant pas empêché Nicolas Hulot de démissionner avec fracas fin août. Au micro de France Inter, l’ancien animateur d’Ushuaïa expose son désarroi devant la France entière. "Je ne comprends pas que nous assistions à la gestation d’une tragédie bien annoncée dans une forme d’indifférence. La planète est en train de devenir une étuve, nos ressources naturelles s’épuisent, la biodiversité fond comme neige au soleil. [...] Et on s’évertue à entretenir voire à réanimer un modèle économique marchand qui est la cause de tous ces désordres".
Déni ou résilience
Avant de partir, Nicolas Hulot a dit espérer que son départ provoque "une profonde introspection de notre société sur la réalité du monde". Un message reçu cinq sur cinq par l’astrophysicien Aurélien Barrau. Ce spécialiste des trous noirs, jusqu’ici très peu connu, a depuis pris son bâton de pèlerin pour rappeler à ses semblables que notre passivité était un crime contre nous-même.
A l’origine d’une tribune dans Le Monde signée par 200 personnalités appelant à un sursaut écologique, il s’est surtout distingué en septembre dernier lors d’une conférence à Bordeaux. Son vibrant appel à "harceler le pouvoir politique" afin de considérer l’écologie comme la priorité des priorités a beaucoup tourné sur les réseaux sociaux.
Durant quelques semaines, Aurelien Barrau a parcouru les médias pour tenter de secouer une opinion publique apathique et une classe politique aveuglée par des intérêts court-termistes. Parallèlement, des initiatives ont émergé ici ou là pour éveiller les consciences, à l'instar de la campagne "On est prêts" lancée par une soixantaine de Youtubeurs.
Selon les collapsologues, deux chemins s’offrent désormais à nos sociétés : soit celui du déni et de l’inaction, auquel cas la chute sera terrible, soit celui de l’anticipation et de la résilience. Autrement dit, faire le deuil d’un modèle économique consumériste et énergivore pour inventer un autre monde. Si cela est (encore) possible…
Vous ne regarderez peut-être plus les biscuits Oreo de la même manière. D'après Greenpeace, le géant américain Mondelez, qui fabrique le célèbre gâteau à base d'huile de palme, aurait en effet participé à la déforestation de 25.000 hectares de forêt tropicale.
Et ce alors même que la multinationale avait promis de se fournir en huile de palme durable d'ici 2020. "La multinationale Mondelez commerce encore avec des producteurs qui pratiquent la déforestation. L'huile de palme peut être produite sans détruire les forêts et les espèces qui y vivent, contrairement à ce que continuent de faire les fournisseurs de Mondelez. Les orangs-outans sont aujourd'hui au bord de l'extinction : ils sont sacrifiés pour des biscuits", explique sur le site de l'ONG environnementale Kiki Taufik, responsable de la campagne forêts à Greenpeace Indonésie.
"On est à un an de l'échéance et Mondelez est lié à des producteurs responsables de déforestation, en Indonésie et en Malaisie. On avait pris 25 producteurs qu'on sait responsables de déforestation en Asie du Sud-Est, et Mondelez est lié à 22 d'entre eux", détaille de son côté Cécile Leuba, chargée de campagne forêt à Greenpeace France, sur Franceinfo.