Comment l’Europe a autorisé le maïs OGM TC1507
Malgré l’opposition de 19 pays sur 28, dont la France, l’Union européenne va donner son feu vert à la culture d’une plante du groupe américain Pioneer.
Un nouvel OGM, le maïs TC1507 du groupe américain Pioneer, va être autorisé à la culture dans l’UE malgré l’opposition de 19 pays dont la France. Sur le sujet ultrasensible des plantes transgéniques dans l’Union, cette décision par défaut, qui demande une bonne connaissance des rouages européens pour la comprendre, suscite de nombreuses réactions. Et illustre les difficultés des Vingt-Huit à s’entendre sur ce dossier. Décryptage.
Qu’est-ce que le «TC1507» ?
Ce maïs produit un insecticide censé tuer la pyrale du maïs. Il est également résistant à plusieurs herbicides dont le principe actif est le glufosinate d’ammonium, sorte de «tondeuse chimique» qui brûle les adventices, c’est à dire les mauvaises herbes. Déposé en 2001, le dossier de Pioneer Hi-Bred avait reçu un avis positif de l’Agence européenne de sécurité alimentaire en 2005. Soumis ensuite à un collège d’experts des différents Etats membres qui n’ont jamais pu se mettre d’accord, le dossier est resté en stand-by. Le Conseil des ministres de l’environnement de l’UE aurait dû trancher, mais la Commission ne lui a jamais transmis le dossier. Enervée par les arcanes de l’UE, Pioneer a alors saisi la Cour de justice européenne pour que la Commission se prononce enfin. Cette prochaine autorisation portera à cinq le nombre d’OGM autorisés à la culture dans l’UE. Dans les faits, un seul OGM est actuellement cultivé dans une poignée d’Etats, le maïs MON810, les autres plantes transgéniques, les maïs BT176 et T25 ainsi que la pomme de terre Amflora, ayant été abandonnés.
Pourquoi cette autorisation a-t-elle été donnée malgré l’opposition d’une majorité de pays ?
Parce que les rouages de la démocratie européenne sont ce qu’ils sont. Hier, le conseil des Etats membres n’est pas parvenu à obtenir une majorité qualifiée pour bloquer cette autorisation. Les opposants à un nouveau maïs transgénique dans les champs européens ne totalisaient que 210 voix alors qu’il en fallait 260 pour bloquer le TC1507. Les abstentions de l’Allemagne (29 voix), de la Belgique (12 voix), du Portugal (12 voix) et de la République tchèque (12 voix) ont manqué pour atteindre la majorité de 260 voix. Cinq pays ont voté pour : Espagne, Royaume-Uni, Suède, Finlande et Estonie. Dix-huit pays ont voté contre, dont la France. Pourtant, le Parlement européen, lui, avait appelé au rejet de la demande d’autorisation par 385 voix contre 201 et 35 abstentions. Une majorité écrasante à son tour écrasée par les règles européennes : la décision du conseil des Etats prévaut sur le vote des eurodéputés.
Quelles sont les réactions ?
Sur son compte Twitter, l’eurodéputée Corinne Lepage hurle au déni de démocratie.
Même exaspération du côté de l’eurodéputé José Bové.
Pour le ministre des Affaires européennes, Thierry Repentin, il «serait incompréhensible que l’opposition d’une majorité de pays puisse se traduire par une autorisation de planter ce maïs transgénique», a-t-il déclaré au Monde. C’est pourtant ce qui va se passer. «Selon la législation européenne, la Commission doit adopter à présent la proposition d’autorisation, il n’existe pas de possibilité pour elle de ne pas le faire», rappelle Roger Waite, porte-parole de la Commission européenne pour l’agriculture et le développement rural.